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RAPPORT DE SYNTHÈSE – SAINT-LOUIS

 

RAPPORT DE SYNTHESE DU SEMINAIRE-ATELIER DE FORMATION SUR LE THEME:

Les obstacles à la mise en œuvre des peines alternatives à l’incarcération et à l’aménagement des peines

SAINT-LOUIS, LES 15 ET 16 FEVRIER 2018

Les 15 et 16 février 2018, s’est tenu à Saint-Louis un séminaire – atelier thématique  sur les obstacles à la mise en œuvre des peines alternatives à l’incarcération et à l’aménagement des peines. Le séminaire organisé par l’Observatoire  National des lieux de privation de liberté  dans le cadre du projet d’appui de l’Union Européenne est destiné aux magistrats du ressort de la Cour d’appel de Saint Louis.

Le séminaire a pour objectif  de réfléchir, d’une part, sur les causes des dysfonctionnements judiciaires dont la surpopulation carcérale est la conséquence et d’autre part, sur les solutions à apporter à cette situation.

Les travaux se sont déroulés en deux phases. La première est consacrée aux communications et la seconde aux travaux d’atelier.

La cérémonie d’ouverture a été présidée par Monsieur Amadou Diop, Adjoint administratif du gouverneur de la région de Saint Louis, représentant ce dernier.

Prenant la parole, Madame l’Observateur national après avoir remercié l’Union Européenne et souhaité la bienvenue à tous les participants, a rappelé à l’assistance les missions de l’Observatoire National et son cadre légal avant de relever les objectifs attendus du séminaire. Il s’agit pour elle de faire des recommandations    afin de rendre la peine d’emprisonnement plus utile dans un contexte de surpopulation carcérale.

El Hadji  Amadou Diouf, président de chambre à la Cour  d’appel de  Saint Louis, représentant le Premier Président de la Cour d’appel a remercié l’Observateur National de l’initiative pour l’organisation de l’atelier  pour les magistrats de son ressort dans un contexte de surpeuplement carcéral.  Il a fait part à  l’assistance des attentes de l’atelier.

Madame Faye, représentant du Ministère de l’économie, des finances et du Plan a remercié également l’Observatoire pour l’initiative et, le gouverneur pour avoir rehausser de sa présence la cérémonie d’ouverture.

Monsieur Amadou Diop, au nom d’Alioune Aidara NIANG Gouverneur de la région empêché, a salué l’assistance et lui a souhaité la bienvenue à Saint-Louis avant de témoigner tout le plaisir de présider la cérémonie d’ouverture. Dans son allocution, il s’est réjoui de l’activité de l’Observatoire National des Lieux de Privation de Liberté pour cette démarche qui consiste à déconcentrer la réflexion sur un thème d’un grand intérêt et d’une grande actualité ainsi sur que le choix de Saint-Louis. Apres avoir listé les 37 établissements pénitentiaires tous construits à l’époque coloniale et dépassant la  plus part  leur capacité d’accueil, le gouverneur a rappelé le cadre légal international et national avant de faire  remarquer qu’en dépit des mesures juridiques prises par l’Etat du Sénégal pour désengorger les prisons, le  constat est  cependant que certains obstacles se dressent contre la mise en œuvre efficiente  des peines alternatives et des mesures d’aménagement des peines. Parmi ces obstacles, on peut citer, entre autres la non-opérationnalité des procédures d’aménagement des peines et l’’absence d’organes devant accompagner l’exécution des peines alternatives.

Et c’est pour venir à bout de ces goulots d’étranglement, dira-t-il, que l’Observateur National, dans le cadre du projet d’appui de l’Union Européenne, organise à Saint-Louis cet atelier thématique.

Apres la cérémonie d’ouverture, les travaux ont été suspendus.

A la reprise, les travaux  du séminaire se sont déroulés en plénière avec des communications et pour modérateur Monsieur Barou Diop, conseiller à la cour d’appel de Saint Louis.

Le premier thème  portant sur « les difficultés de mise en œuvre  des peines alternatives » a été développé par Monsieur Ndiamé GAYE, Président Tribunal de Grande Instance de Saint Louis.

   En introduisant sa  communication, il a rappelé le cadre légal international constitué notamment par la Déclaration Universelle des droits de l’homme  considérée comme la pierre angulaire  et la source d’inspiration de tous les droits fondamentaux et qui, en son article 5 proclame avec force que « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». La prise en compte de ce principe, dira-t-il,  a amené  la communauté internationale a adopté plusieurs directives et instruments juridiques contraignants pour fortement humaniser la sanction pénale et les conditions de détention. Mais devant le recours systématique à l’incarcération et son corollaire, le surpeuplement, la prison est devenue de plus en plus un milieu criminogène.  La prison ne répondant plus à sa vocation, la communauté internationale s’est engagée, dans une démarche de diversification des peines alternatives en développant qualitativement  le référentiel international déclaratif notamment les règles minima des Nations unies pour l’élaboration de mesures non privatives de liberté (dites règles de Tokyo adoptées par l’Assemblée générale dans sa résolution 45/110 du 14 décembre 1990) ,  les principes fondamentaux des Nations unies concernant le recours à des programmes de justice réparatrice en matière pénale (Adoptées par l’Assemblée générale dans sa résolution 2001/12 du 24 juillet 2002), les règles des Nations unies concernant le traitement des détenus et l’imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (dites règles de Bangkok , adoptées par l’Assemblée générale dans sa résolution 65/229 du 21 décembre 2010).

Les États s’efforçaient ainsi de réduire la surpopulation et le recours à la détention provisoire, lorsque cela est approprié  en encourageant un accès accru aux mécanismes de justice et de défense par le renforcement des alternatives à l’emprisonnement.

Le Sénégal, en conformité avec ses engagements  internationaux et régionaux,  a modifié le code pénal et le code de procédure pénale notamment avec les lois 2000-38 et 2000-39 du 29 décembre 2000 et leur décret d’application 2001-362 du 04 mai 2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des sanctions pénales,  et récemment la loi 2016-29 du 08 novembre 2016 portant modification du code pénal pour introduire des peines alternatives à l’incarcération. Le président du TGI de Saint Louis a axé sa communication sur deux points. Il a dans une première partie abordé les différentes peines alternatives avant de faire des propositions.

Abordant le premier point , Monsieur Ndiamé Gaye a noté que le législateur sénégalais à travers la réforme de 2000, a introduit dans le code pénal des modes d’aménagement des peines notamment en son ’article  44.2 qui liste une  panoplie des mesures novatrices que sont : le sursis, la probation, le travail au bénéfice de la société (TBS) la semi-liberté, le fractionnement de la peine , la dispense de peine et ajournement dont certaines constituent de véritables substitutions à l’incarcération.

A  ces mesures citées expressément par la loi dont la liste n’est pas exhaustive, il y’a lieu d’ajouter les peines d’amende et certaines peines complémentaires notamment celles  introduites par les articles 33.1 à 35.3 du code pénal qui doivent en réalité fonctionner comme des modes palliatifs à l’emprisonnement.

Abordant la question du sursis, mesure fréquemment usitée dans la pratique, le communicateur note l’absence d’une gestion rationnelle et fiable du casier judiciaire. Il a aussi relevé la difficulté liée à son exclusion pour certaines infractions par l’article 44-2 du code pénal et pour d’autres  comme les coups et blessures à conjoint, les vols aggravés, les blessures involontaires avec délit de fuite, le vol de bétail en présence d’un désistement de plainte ou de réparation du préjudice causé il  a noté.

Ce dernier délit (vol de bétail) a crée un véritable problème dans le rôle des tribunaux d’instance.

En ce qui concerne la probation, il a noté le recours presque inexistant à cette mesure en ce que sa mise en œuvre nécessite la mise en place d’un dispositif de contrôle. Par ailleurs l’absence de précision et de fiabilité des adresses  et la mobilité de certaines populations, constituent des difficultés supplémentaires même si la probation constitue un véritable mécanisme de d’amendement et de resocialisation du délinquant.

Pour ce qui est du  travail au bénéfice de la société (TBS), ses modalités d’exécution sont déterminées par le Comité d’Approbation et de surveillance. Il a relevé qu’avec la réforme de 2016, la loi a supprimé la condition de la fraction de la peine pour en faire un véritable mode alternatif à l’emprisonnement pour les peines prononcées supérieures à trois ans. Cette mesure comme palliatif à l’emprisonnement semble douteuse selon le président Gaye.   D’abord, la loi le prescrit comme une peine complémentaire à la sanction principale qu’est la prison et il faut le consentement de l’intéressé. C’est ensuite une mesure difficile de mettre en œuvre car nécessitant la collaboration d’entités extérieures à l’environnement judiciaire. La difficulté réside, à ce niveau, sur l’absence d’informations du juge sur la personne morale qui devrait bénéficier des services  du prévenu et sur la structure chargée de la mise en œuvre de la mesure. Il n’y a pas encore de cas d’espèce au TGI de Saint Louis.

S’agissant de  la dispense de peine et de l’ajournement,  leur mise en œuvre ne pose à priori  aucune difficulté particulière, le juge appréciant librement les circonstances de l’espèce et la personnalité du délinquant. Dans la pratique du TGI de Saint Louis, il est souvent fait recours à cette mesure notamment l’ajournement pour mettre la pression sur le délinquant et l’obliger à réparer le préjudice causé.

Enfin la semi-liberté, bien que pouvant être prononcée par le juge, opère en réalité comme un aménagement de la peine pour permettre au délinquant de poursuivre un projet professionnel ou de formation. Toutefois, elle a l’avantage de réduire considérablement la durée de la détention, dira-t-il.

Abordant la seconde partie de sa communication, le président Ndiamé Gaye a proposé deux mesures. La première est de réunir toutes les conditions nécessaires pour l’application effective du dispositif existant, notamment la mise en place du cadre institutionnel chargé du contrôle des mesures  alternatives. Les juridictions doivent à cet effet pouvoir développer un véritable partenariat avec les services publics et associations à l’échelle des régions et départements pour disposer des offres et outils d’amendement, de reclassement ou de formation et même d’enquêtes de personnalité. La fonctionnalité du casier judicaire est aussi une exigence non négligeable.

Par ailleurs, à l’interne des juridictions, un dialogue permanent entre les acteurs de la chaine pénale (siège et parquet) permettra de définir une politique pénale cohérente et efficace, adaptée au milieu.

Enfin les maisons de justice doivent d’avantage appuyer les médiations pénales. Elles peuvent aussi jouer un rôle important dans les mécanismes de probation et de suivi.

La seconde mesure, est d’essayer d’améliorer le cadre juridique existant et l’exploration d’autres mécanismes de substitution à la détention.

En effet, il est possible  d’élargir le champ d’application des peines alternatives en réduisant les exclusions ou même autoriser le juge, selon les circonstances propre à chaque cas, de lever les exclusions.

Une réflexion pourra aussi  être menée pour apprécier l’adaptation des expériences des autres pays dans notre dispositif législatif.

Certains pays anglo-saxon,  par exemple, font un recours systématique   à la caution laissant la liberté au juge d’accepter ou non cette garantie de représentation en justice. Il y a aussi l’expérience de la justice réparatrice qui place la victime au centre du dispositif. A chaque fois que son préjudice est réparé ou qu’elle renonce à des poursuites, la détention est écartée. Le recours à la surveillance électronique (bracelet ou tout autre dispositif) doit être exploré surtout que dans nos pays les adresses ne sont pas fiables.  Dans certains pays comme la Belgique, il y a un recours à la médiation pénale pour « sortir de l’inflation pénale » ou au renforcement du contrôle judiciaire comme alternatives à la détention provisoire.

C’est notamment le cas de la plupart des pays de l’Union européenne qui disposent de peines de probation, sous des conditions propres à chacun des pays, D’autres pays ont développé l’exécution des courtes peines en milieu ouvert (Suède).

Monsieur Seyni Bodian, conseiller à la Cour d’Appel de Saint Louis a abordé le second thème de l’atelier « la problématique de la pratique de l’aménagement des peines »  et l’a axé sur deux parties.

Dans une première, il a abordé le cadre juridique de l’aménagement des peines avec la reforme de 2000. C’est ainsi dira-t-il que plusieurs ont été prises par le législateur.

La première série de mesures tend à lutter contre la surpopulation carcérale. Il s’agit du sursis, de la probation, du travail au bénéfice de la société (TBS), de la dispense, de l’ajournement qui sont prises par le tribunal. Il s’agit ensuite de la suspension de peine et de la remise de la remise de peine qui sont prises par le comité d’aménagement (CAP). IL s’agit enfin de la libération conditionnelle qui est accordée par le ministre de la justice.

La seconde série de mesures tend à assurer la réinsertion sociale. C’est le cas de la semi-liberté et du fractionnement, prises par le tribunal d’une part, et, mesures prises par le JAP que sont les permissions de sortir, les autorisations de sortir sous bonne escorte et les placements à l’extérieur, d’autre part.

La troisième série de mesures est constituée par la mise ne place d’un cadre institutionnel: Tribunal, le juge de l’application des peines (JAP), Comité de l‘aménagement des peines, la Commission de surveillance,  le Comité de suivi en milieu ouvert, du service socio-éducatif.

Le président Bodian a fait remarquer que malgré ce dispositif, les résultats attendus n’ont pas été atteints à cause de plusieurs obstacles.

Ces difficultés sont d’abord d’ordre légal. Il s’agit de l’équivocité des textes (ex: articles 692-1et 707-31en matière de fractionnement de la peine, 693-4 en matière de réduction de la peine).

Elles sont ensuite liées aux exclusions légales en matière de détournements de deniers publics, de stupéfiants, de délits douaniers, d’agressions sexuelles, violences notamment entre conjoints.

Elles sont  enfin d’ordre institutionnel avec lourdeur dans la composition des organes.

Terminant sa communication, Monsieur Seyni Bodian a fait une série de propositions. Il s’agit :

  • De doter le JAP de moyens suffisants et en faire une juridiction.
  • D’instituer des voies de recours pour les décisions du JAP.
  • DE rendre plus fonctionnels les organes en les allégeant.
  • De revoir la législation en matière de drogues.

 

Apres les communications les interventions ont tourné principalement sur la nécessité de revigorer les services de recouvrement des amendes, au vol de bétail avec la nécessité de définir la notion de bétail, l’aménagement des pouvoirs du juge de l’application des peines (JAP) et l’urgence de moderniser les lieux.

Apres la première journée consacrée aux communications, les participants ont été repartis en deux groupes pour les travaux d’atelier. A l’issue de ces  travaux, plusieurs recommandations ont été faites.

Pour  les peines alternatives à l’incarcération :

  • Sursis : trop d’exclusions qui vident l’institution de sa substance. Il faudra revisiter le dispositif afin de voir comment encadrer davantage cette notion ; CBV, agressions sexuelles, vol de bétail, usage de chanvre indien
  • Probation: il s’agit d’enlever la condition liée à la peine, rendre fonctionnel le dispositif de suivi et renforcer les moyens du JAP et du Comité d’aménagement, explorer la possibilité d’une surveillance électronique et l’injonction thérapeutique
  • Le Travail au bénéfice de la société: ramener le plancher à un  an, Identifier les organismes destinés à recourir aux condamnés
  • Ajournement et Dispense de peine : Encourager les magistrats à recourir davantage à ces notions.
  • Semi-liberté: le juge n’est pas bien outillé pour apprécier la personnalité du prévenu.
  • Encourager le recours à l’amende surtout en cas d’application de l’article 433 CP et rendre fonctionnel le service de recouvrement.
  • Recourir aux peines de substitution: suspension du permis (de conduire, chasse, armes), retrait et annulation des permis.

Pour  l’aménagement des peines :

  • Drogues : pour la détention en vue de la consommation personnelle, prévoir le sursis ou à l’amende en substitution et pour le trafic revenir au dispositif ancien.
  • Infractions économiques (abus de confiance, escroquerie et autres) : recourir fréquemment à l’ajournement et après exécution des engagements dispenser de la peine.
  • Travail au bénéfice de la société : Encourager un partenariat avec les organismes ou établissements publics pour une mise en œuvre effective.
  • Réduction de la peine : clarifier davantage l’article 693-4 du CPP

Clôturant les travaux, l’Observateur National et le représentant du premier président de la Cour d’appel de Saint Louis ont remercié les participants et relevé la richesse et la profondeur des débats.

 

BAROU  DIOP

Conseiller à la Cour d’Appel de Saint Louis

Rapporteur-modérateur

Fait à Saint-Louis  le 16 Février 2018

LE  REGISSEUR

YOUNOUSSE  KANE.

 

RAPPORT DE SYNTHESE – KAOLACK

RAPPORT DE SYNTHESE  DE L’ATELIER THEMATIQUE RELATIF AUX OBSTACLES A LA MISE EN ŒUVRE DES PEINES ALTERNATIVES A L’INCARCERATION ET A L’AMENAGEMENT DES PEINES TENU A KAOLACK LES MARDI 14 ET MERCREDI 15 NOVEMBRE 2017.

Les 14 et 15 novembre 2017, s’est déroulé à Kaolack un séminaire organisé par l’Observateur  National des lieux de privation de liberté (ONLPL) au profit des magistrats du ressort de la Cour d’appel de Kaolack.

Cet atelier  qui a porté  sur LES OBSTACLES A LA MISE EN ŒUVRE DES PEINES ALTERNATIVES A L’INCARCERATION ET A L’AMENAGEMENT DES PEINES  ,  a regroupé  vingt (20) participants provenant des tribunaux de grande instance de Fatick , de Kaolack et de Tambacounda, des tribunaux d’instance de  Gossas , Foundiougne , Kaolack, Kaffrine , Nioro, Koungueul, Koumpentoum, ainsi que des membres de la cour d’appel de Kaolack . (La liste de présence est annexée au présent rapport).

Ce séminaire avait, pour objectif principal  de réfléchir, d’une part, sur les causes des dysfonctionnements judiciaires dont la surpopulation carcérale est la conséquence, et d’autre part, sur les solutions à apporter à cette situation.

 Les objectifs spécifiques étaient les suivants :

 Susciter un échange de vues sur la situation carcérale au Sénégal ;

  • Inviter les acteurs du système judiciaire à recourir davantage aux peines alternatives ;
  • Rechercher les causes de la non-fonctionnalité de certains organes d’aménagement des peines ;
  • Proposer un plan d’action à mettre en œuvre afin de désengorger les prisons.

Les travaux se sont déroulés comme suit :

  • La cérémonie d’ouverture ;
  • La synthèse des communications ;
  • Les discussions et débats ;
  • Les travaux de groupes, restitution et recommandations ;
  • La clôture

 

  • Cérémonie d’ouverture

La cérémonie d’ouverture a été ponctuée par  trois allocutions que sont les discours du Gouverneur de la région de Kaolack, de Monsieur  le Premier président de la Cour

d’appel de Kaolack,  Ousmane Kane et de l’Observateur National des lieux de privation de liberté,  Madame Josette Marceline Lopez Ndiaye.

Dans son discours, Monsieur le gouverneur a souhaité la bienvenue à tous les participants.  Il a remercié  l’ Observateur National pour son initiative d’ organiser ce genre de rencontre.

Selon lui, le gouvernement  accorde une grande priorité à la préservation des droits humains. C’ est pourquoi toute initiative allant dans le sens de les renforcer suscite un intérêt particulier pour les pouvoirs publics.

Pour lui, prévenir les exactions dans le milieu carcéral est une impérieuse nécessite et l’Observateur National s’y attèle avec abnégation.

Il a enfin souligné que le recours aux peines alternatives  à la détention permet de désengorger les prisons et de donner une seconde chance aux prévenus.

Quant au premier président de la cour d’appel, il a fait remarquer que les textes sur l’aménagement des peines ont été mis en place  depuis longtemps mais les magistrats ne s’en sont pas suffisamment appropriés.

Cette situation s’explique, selon lui, par le déficit d’informations, les juges continuant d’appliquer les textes qui leur sont plus  familiers.

Aussi le cumul des fonctions de juge de l’application des peines ( JAP) avec leurs fonctions habituelles de juge du siège ou de président de tribunal d’ instance n’ est pas pour leur faciliter la tâche . En effet ils accordent souvent la priorité à leur fonction principale.

Il s’y ajoute qu’avec la mobilité des juges, des JAP expérimentés changent souvent de juridiction  et  en même temps de fonction. Ce qui entraine un éternel recommencement.

Puis c’était le tour de Mme l’observateur de rappeler les missions  de l’ONLPL  qui sont de « contrôler  les conditions de prise en charge et de transfèrement  des personnes privées de liberté afin de s’assurer de leurs droits fondamentaux et de prévenir la torture et autres peines ou traitements inhumains, cruels et dégradants ».

Elle a rappelé  que le Sénégal est le premier pays africain à avoir ratifié en 2006 le protocole facultatif relatif à la convention sur la torture  et les autres peines, traitements inhumains  cruels ou dégradants.

Que c’est dans ce cadre qu’il a fait voter la loi 2009-13 du 02 mars 2009 et  pris son décret d’application 2011-842 du 16 juin 2011 instituant l’ONLPL.

Elle a souligné que le constat est alarmant  dans les prisons où la surpopulation carcérale est inquiétante rendant très obsolètes les conditions de vie des détenus.

Selon elle,  le recours aux modes d’aménagement des peines et  l’ application par les magistrats des peines alternatives à l’ incarcération permettraient  de réduire cette surpopulation.

Ainsi  les incarcérations inopportunes peuvent être évitées.

Elle a insisté sur  l’utilité de préparer la réinsertion sociale des détenus et leur meilleure intégration dans la société.

  • La synthèse des communications

Les travaux du séminaire avaient pour modérateur Monsieur Saliou Ndiaye, président du  tribunal de grande instance de Fatick.

Deux thèmes ont été présentés successivement par  Monsieur Abdoulaye DIAGNE GUEYE, substitut du Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Kaolack et par Monsieur Jean Marie DIONE, Juge d’application des peines  dans ladite juridiction.

Le premier était intitulé « les difficultés de mise en œuvre des peines alternatives. »,

Le second  était intitulé « la problématique de la pratique de l’aménagement des peines. »,

 

2-1  les difficultés de mise en œuvre des peines alternatives.

Abordant ce thème , monsieur Gueye a noté que le Sénégal, en conformité avec ses engagements  internationaux et régionaux,  a modifié le code pénal et le code de procédure pénale notamment avec les lois 2000-38 et 2000-39 du 29 décembre 2000 et leur décret d’application 2001-362 du 04 mai 2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des sanctions pénales,  et récemment la loi 2016-29 du 08 novembre 2016 portant modification du code pénal.

Il a listé les peines de substitution à l’incarcération que sont le sursis, l’amende , le fractionnement de la peine, l’ ajournement , le travail au bénéfice de la société qui visent à prévenir le risque de récidive, le caractère parfois désocialisant de l’incarcération et le surpeuplement des prisons .

Il a fait remarquer que ces peines ne sont pas toujours appliquées.

C’est pourquoi, il a relevé dans la première partie de sa communication, les principales difficultés liées à leur application.

Pour le sursis, il  a noté la difficulté liée à son exclusion pour certaines infractions par l’article 44-2 du code pénal et pour d’autres  comme les coups et blessures à conjoint, les vols aggravés, les blessures involontaires avec délit de fuite, le vol de bétail.

Pour la dispense de peine, il a expliqué que le juge pourra difficilement contrôler l’effectivité du reclassement du prévenu.

Quant à l’amende, il a fait état des difficultés liées à son recouvrement.

En ce qui concerne le fractionnement de la peine et la probation, il a constaté l’absence de précision et de fiabilité des adresses des prévenus. En plus, certains d’ entre eux  sont très mobiles et donc difficilement localisables.

Relativement à l’ajournement de la peine et au travail au bénéfice de la société, il a précisé que le prévenu doit être présent à l’audience pour en bénéficier. En plus, pour la seconde modalité, l’acquiescement de celui-ci est requis.

La difficulté réside, à ce niveau, sur l’absence d’informations du juge sur la personne morale qui devrait bénéficier des services  du prévenu et sur la structure chargée de la mise en œuvre de la mesure.

Vu ces difficultés, il a, dans une deuxième partie, proposé des solutions pour les juguler.

Ainsi, il a fait les  propositions suivantes :

  • définir clairement les modes d’aménagement des peines et les peines alternatives à l’incarcération ;
  • assurer la mise en place effective des organes chargés du contrôle et du suivi des mesures ordonnées ;
  • Sensibiliser les juges sur le choix de la politique pénale et  les doter de moyens permettant de réaliser les objectifs fixés ;
  • recourir aux enquêtes de personnalité ;
  • Elargir le champ d’application des peines alternatives en réduisant les exclusions.

2-2 -la problématique de la pratique de l’aménagement des peines.

Développant ce thème, le communicateur a axé son intervention sur deux points à savoir les difficultés de mise  en œuvre des mesures d’aménagement des peines  et les perspectives de réforme pour leur mise en œuvre effective.

Il a expliqué que le Sénégal , dans le souci de se conformer à ses engagements internationaux, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 et des Règles minima des Nations Unies pour l’élaboration de mesures non privatives de liberté, a procédé à l’adoption de plusieurs textes:

  • Les lois 2000-38 et 2000-39 de 29 décembre 2000, modifiant respectivement le code pénal et le code de procédure pénale ;
  • Le décret 2001-362 du 04 mai 2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des sanctions pénales ;
  • La loi 2016-29 du 08 novembre 2016 (dans sa modification de l’article 44-3 du code pénal ;
  • Loi 2009-13 du 02 mars 2009 portant sur l’Observateur National des lieux de privation de liberté.

A travers ces textes, se dégagent la volonté de réduire le recours à l’incarcération  par des peines de substitution à l’emprisonnement  et  le souci d’humaniser les conditions de vie des détenus en préparant leur réinsertion et en leur offrant des possibilités de sortie avant le terme de leurs peines.

Mais selon lui, malgré ces textes, la surpopulation carcérale demeure toujours une réalité.

Le tableau ci-dessous en donne une idée

Maison d’arrêt et de correction

(MAC)

Capacité d’accueil Effectif à la date du 25 octobre 2017
Effectif total Détenus provisoires Condamnés
Mac Kaolack 550 678 349 329
Camp pénal

Koutal

200 258 258
MAC Fatick 220 220 101 119
MAC Kaffrine 90 112 02 110
MAC Gossas 100 111 01 110
 MAC Nioro 70 71 01 70
Foundiougne 60 45 02 43
Tambacounda 138 444 80 364
Total 1428 1939 536 1403

 

Le communicateur a expliqué les difficultés de mise en œuvre des mesures d’aménagement des peines par :

* une politique pénale floue :

Par exemple l’exclusion prévue par l’article 44-2 du code pénal pour certaines infractions, la criminalisation du trafic de drogue avec l’aggravation des peines qui ne peuvent être inférieures à 10ans de travaux forcés.  En effet, le code des drogues prévoit que « le condamné ne peut, en aucun cas, bénéficier d’une permission de sortie, d’un placement à l’extérieur ni de semi-liberté. La libération conditionnelle ou la grâce ne peuvent être accordées à aucun condamné avant l’exécution des 4/5 de la peine prononcée ».

Le tableau suivant illustre le nombre important  occupé par les détenus condamnés pour des infractions liées aux stupéfiants, au niveau de la population carcérale.

Maison d’arrêt Condamnés  pour des affaires de drogue
Kaolack 212
Camp pénal Koutal 94
Fatick 80
Kaffrine 38
Gossas 58
Nioro 19
Foundiougne 12
Total 513 sur 1495 soit 34,314%

 

Par ailleurs, les exclusions ont eu pour conséquences un petit nombre de bénéficiaires  pour les mesures de grâce et de libération conditionnelle. Ainsi, pour 2017, on a enregistré seulement 03 grâces pour Koutal contre 00 en 2016 et 00 en 2015,  07 pour la MAC de Kaolack  contre 123  pour l’année 2016.

* des organes non fonctionnels,  ou insuffisamment fonctionnels :

  • le juge de l’application des peines travaille seul, sans greffier ni personnel d’appoint ;il a tendance à s’ occuper d’abord de ses fonctions de juge , puis de JAP subsidiairement.
  • Le comité de suivi en milieu ouvert n’est pas souvent mis en place.
  • Le processus de désignation de ses membres est
  • La commission de surveillance présidée par le gouverneur n’est pas très souvent opérationnelle.
  • Le comité de l’aménagement des peines décèle une lourdeur dans la composition et le mode de désignation de ses membres.

* une organisation inefficace

Le JAP n’est pas souvent consulté pour le transfèrement des détenus. Les dossiers de ceux envoyés dans son ressort ne lui sont pas transmis.

Il ne dispose pas souvent d’informations sur les voies de recours intentées par les condamnés.

Pourtant le décret 2001 -632 du 04 mai 2001relatif aux procédures d’exécution, d’aménagement des sanctions pénales  prévoit que le JAP doit être informé de l’état des effectifs et de la capacité d’accueil de la MAC ou du camp pénal.

Il s’y ajoute le temps d’épreuve trop long (2/3, 4/5 selon le cas) pour bénéficier de certains aménagements  de peines.

Pour juguler tous ces problèmes, le communicateur a fait les propositions de réformes suivantes :

  • autonomiser le JAP ;
  • le doter d’un véritable cabinet (greffier, secrétaire, …) ;
  • mettre en place un mécanisme permettant de transmettre tous les dossiers de condamnés au JAP et de l’informer de tous les actes de procédure, notamment des voies de recours;
  • mettre en place un tableau synoptique pour surveiller les délais dans l’optique des procédures de libération conditionnelle, de réduction de peine, de semi-liberté, etc… ;
  • affecter de véritables travailleurs sociaux au niveau des services socio-éducatifs des prisons ;
  • transmettre aux organes de décision des dossiers d’enquête sociale et de personnalité pour pouvoir prendre les décisions utiles ;
  • alléger le processus de désignation des membres des comités de suivi en milieu ouvert et des comités de l’aménagement des peines ;
  • dégager les moyens nécessaires pour faire fonctionner tous les organes ;
  • instaurer des chambres d’aménagement des peines ;
  • tenir des audiences à périodicité régulière ;
  • aménager des voies de recours pour le condamné et le procureur au niveau d’une chambre d’aménagement des peines qui serait créée à la cour d’appel ;

3 -Discussion et débats

A l’issue des communications, les participants ont accentué leurs interventions sur la nécessité de réformer certains textes qui réduisent le champ d’application des mesures d’aménagement des peines ou l’application de peines alternatives.

Ils ont demandé que l’exclusion du bénéfice des mesures d’aménagement soit réduite au minimum et le temps de mise à l’épreuve diminué.

Ils ont déploré les conditions de travail du JAP qui ne dispose pas des moyens lui permettant d’exercer convenablement ses fonctions.

Ils n’ont pas entériné  la proposition du communicateur Jean Marie DIONE, relative à la mise en place de chambres d’aménagement des peines  au niveau des tribunaux de grande instance. Cette solution serait source de lourdeur des procédures.

Ils ont aussi débattu des peines prévues pour le vol de bétail  qui sont à leur avis trop sévères (05 à 10 ans) et ne prennent pas en compte la personnalité du délinquant.

Le juge est enfermé car n’ayant pas la possibilité d’accorder le sursis.

Ils ont essayé de donner un contenu à la notion de bétail qui, pour certains, renvoie à un  ensemble, c’est à dire à une pluralité de bêtes domestiques. Pour d’autres, la loi est claire et ne laisse pas de possibilités d’interprétations, le bétail pouvant renvoyer à un ou plusieurs éléments.

En somme un consensus n’a pas été  trouvé sur ce point

4- Les travaux de groupes et restitution

Par la suite, les participants ont défini deux thèmes  et se sont divisés en deux sous-groupes pour  s’y pencher. Il s’agit des thèmes suivants :

  • les obstacles aux peines alternatives à l’incarcération ;
  • les obstacles à l’aménagement des peines.

A la fin des exercices, chaque groupe a présenté en plénière les résultats de ses travaux qui ont fait l’objet de discussions.

Ces travaux sont récapitulés dans les tableaux  suivants contenant également les recommandations des participants

Premier sous thème

OBSTACLES AUX PEINES ALTERNATIVES
           DIFFICULTES      RECOMMANDATIONS
Ø  Exclusion des peines alternatives pour certaines infractions (Art 44-2 CP)

Ø  Ineffectivité du recouvrement des amendes prononcées par les juridictions de jugement

Ø  Absence d’informations sur le reclassement du délinquant, la réparation du dommage et le trouble à l’ordre public pour la dispense de peine (Art 707-33)

Ø  Absence d’éléments d’appréciation objectifs sur la situation personnelle et professionnelle du prévenu (Fractionnement de la peine et Probation, art 707-1, 707-32 CPP)

Ø  Absence de mesures administratives préalables pour la mise en œuvre  des conditions posées pour l’ajournement de peine et le travail au bénéfice de la société (Art 707-32 CPP, 44-3 CP)

Ø  Non fiabilité du Casier judiciaire

     Elargir le champ d’application des peines alternatives (réduire les exclusions notamment pour les délits relatifs aux stupéfiants et  le vol de bétail).

Définir clairement les modes d’aménagement des peines et les peines alternatives à l’incarcération ;

Assurer la mise en place effective des organes chargés du contrôle et du suivi des mesures ordonnées;

Faire une réforme globale du système de recouvrement des amendes ;

Sensibiliser les juges sur le choix  de la politique pénale et  les doter de moyens permettant de réaliser les objectifs fixés ;

Recourir aux enquêtes de personnalité;

Faire un travail de vulgarisation des textes

 

 

Second sous thème

                                     OBSTACLES A L’AMENAGEMENT DES PEINES
 LES DIFFICULTES JURIDIQUES  ET SOLUTIONS PRECONISEES
                  DIFFICULTES          Recommandations / SOLUTIONS
1-Les interdictions de l’article 44-2  du code pénal Réformer la loi pour limiter l’interdiction seulement aux cas de récidive et à la matière criminelle
2- la sévérité du régime juridique  du code des drogues Réviser le texte pour revenir à une correctionnalisation des infractions liées aux stupéfiants et  permettre  un aménagement des peines
3-les interdictions de l’article 368 relatives aux vols qualifiés Modifier le texte pour entrevoir des possibilités d’aménagement
LES DIFFICULTES ORGANISATIONNELLES ET MATERIELLES ET SOLUTIONS              PRECONISEES
                        Difficultés       Recommandations / SOLUTIONS
1-au niveau du JAP : la non consultation du JAP en cas de transfèrement d’un condamné : article 693 CPP, pas de mécanisme d’information du JAP sur la situation de tout condamné , absence de personnel d’appoint, caractère accessoire de la fonction de JAP L’accroissement des compétences du JAP et le doter d’un véritable cabinet autonome avec greffier, secrétaire etc…….
2-au niveau du service socio-éducatif : la non-conformité de la composition du service au texte article 264 du décret N°2001-362 du 04 Mai 2001 exemple : la loi a prévu que le service doit comporter des assistants sociaux mais dans la pratique c’est un garde pénitentiaire qui l’occupe Affecter des travailleurs sociaux au niveau du service socio-éducatif
3 la non mise en place du comité de suivi en milieu ouvert Désigner dans la loi des membres de droit du comité de suivi en milieu ouvert (des membres es -qualité)
4-le manque de coordination entre les différents acteurs : JAP, administration pénitentiaire,  etc. ……… Mettre en place un cadre de concertation pour harmoniser les actions
5-la vétusté et l’insuffisance des prisons Réfectionner les prisons existantes  et en Construire de nouvelles

 

              5-La clôture

Au terme des deux jours  d’étude, deux allocutions ont été prononcées.

D’abord celle de Madame Josette Lopez Ndiaye qui a tenu à remercier les différents participants pour leurs différentes contributions et la richesse des débats.

Elle a  invité les magistrats  à davantage appliquer les textes sus évoqués.

Elle a souligné qu’il est souhaitable que la direction des affaires criminelles et des grâces incite les magistrats du parquet à requérir des peines alternatives à l’emprisonnement.

Elle a aussi ajouté que des travaux de restitution seront organisés à travers un atelier national regroupant les différentes Cours d’appel.

Ensuite, Monsieur le premier président de la cour d’appel a prononcé le discours de clôture de la rencontre en insistant sur la nécessité de s’approprier les textes.

Il a évoqué la nécessité  pour le juge d’être très équilibré dans ses décisions en prenant, certes, en compte les risques de trouble à l’ordre public, mais aussi la personnalité du délinquant.

Selon lui, les sanctions inopportunes et inappropriées à la circonstance de l’espèce peuvent être évitées.

Kaolack le 15 novembre 2017

 

Le rapporteur général

Saliou Ndiaye président du TGI de Fatick

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Allocution de l’Observateur National à l’ENAP

Monsieur le Garde des Sceaux Ministre de la Justice,

Son excellence monsieur l’ambassadeur  de la Délégation de l’Union Européenne,

Monsieur le Directeur de l’Ecole Nationale de l’Administration Pénitentiaire,

Monsieur le Directeur Général de l’Administration pénitentiaire,

Monsieur le Procureur général près la Cour d’Appel de Dakar,

Monsieur le Procureur de la République près le Tribunal régional Hors Classe de Dakar,

Monsieur le président du comité Sénégalais des Droits de l’Homme,

Le président de la Ligue Sénégalaise des Droits Humains,

Monsieur le président de la RADDHO,

Monsieur le Directeur d’Amnesty International Sénégal,

Monsieur le représentant résident du haut-commissariat des Droits de l’homme à Dakar,

Monsieur le coordonnateur du Projet PESON,

Monsieur le Directeur de la Coopération et des Financements Extérieurs,

Honorables invités,

Chers élèves de la deuxième promotion de l’ENAP,

Il m’est particulièrement agréable de prendre la parole en ce jour, pour marquer la cérémonie officielle d’ouverture de cette présente session de formation à l’intention des élèves de la deuxième promotion de l’ENAP.

Mr le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice,

Votre présence parmi nous, nous honore et nous comble toujours de joie,     car il constitue la preuve éloquente de votre attachement indéfectible à accompagner l’Observateur National des lieux de privation de liberté (ONLPL) dans sa noble et exaltante mission de prévention de la torture et mauvais traitements.

Soyez en remercié.

Mesdames et Messieurs, Distingués invités,

Permettez moi, de saluer ici, la vision du Président de la République qui,  ayant à cœur la promotion des droits humains, en a fait une priorité, dans l’axe 3 de son plan Sénégal Emergent.

Nous n’oublierons pas, par la même occasion, d’adresser à la Délégation de l’Union Européenne, toute notre gratitude, pour l’appui constant et inestimable qu’il a accordé à l’ ONLPL, pour la réalisation de cet ambitieux programme de sensibilisation et de formation des agents d’exécution de loi, dans presque toutes les contrées du Sénégal, dans  le noble  but de  participer au renforcement de l’ état de droit au Sénégal.

J’associe à ces remerciements, Mr le Directeur de l’école nationale de l’administration pénitentiaire, le corps enseignant, ainsi que l’ensemble de ses  collaborateurs  qui exercent avec efficacité leur mission pédagogique.

Il me plaît de rappeler, Mesdames et Messieurs, distingués invités, que la formation qui va être dispensée à ces élèves de la deuxième promotion de l’ENAP, trouve son fondement dans le protocole facultatif à la convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT) du 18 Décembre 2002, ainsi que de la loi 2009-13 du 02 Mars 2009 instituant l’Observateur National des lieux de privation de liberté et son décret d’application n°2011-842 du 16 Juin 2011.

Aux termes de ces instruments juridiques susmentionnés, l’Observateur National des lieux de privation de liberté est investi d’un mandat qui s’articule autour de la prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de privation de liberté.

Notre présence en ces lieux, s’inscrit justement dans ce cadre et notre institution tient particulièrement, après les précieux enseignements dispensés par des praticiens rompus, aux élèves de la police et de la gendarmerie, à participer à leur formation initiale, en leur apportant des outils indispensables pour combattre la torture et autres mauvais traitements.

Chers apprenants,

Grâce à la qualité des formations, dispensées dans cette prestigieuse école, nous ne doutons point, que vous allez devenir de jeunes professionnels qui  allez bientôt rejoindre les rangs de vos collègues plus anciens, afin non seulement, d’accroître les effectifs mais également, de contribuer significativement à la protection des droits des personnes privées de libertés.

Le renforcement de vos capacités en droits humains est destiné à vous inculquer une culture pénitentiaire, hautement marquée par le respect de la dignité humaine. Ce savoir-faire et savoir-être sont, aujourd’hui, indispensables pour vous construire une nouvelle identité professionnelle, adaptée aux nouvelles normes internationales, avec des comportements nouveaux, conformes aux règles actuelles de respect des droits fondamentaux des personnes, en situation de vulnérabilité,  que vous êtes appelés à prendre en charge, tout au long de votre carrière professionnelle.

Chers élèves,

Vous avez la responsabilité de ce que sera l’administration pénitentiaire de demain. Instruisez- vous pour servir notre pays, avec professionnalisme, intégrité et probité.

Cette formation qui vous sera  donnée va, sans nul doute, nous faciliter la déclinaison opérationnelle  de notre mandat de prévention de la torture et autres mauvais traitements. Cette activité s’inscrit dans une dynamique  de  vulgariser la prévention de la torture et  mauvais traitements dans tout lieu de privation de liberté.

Durant ces trois jours, les formateurs, éminents experts dans leurs domaines  respectifs, vont se charger de partager avec vous, leurs réflexions et leurs expériences diverses,  pour vous inculquer les bonnes pratiques sur le terrain de la prévention contre la torture et les maltraitances des personnes privées de liberté.

Merci de votre aimable attention.

 

 

Allocution de l’Observateur National à l’atelier thématique de dakart

Monsieur le Procureur Général près la Cour d’Appel de Thiès

Monsieur le Président de l’Union des magistrats du Sénégal

Monsieur le bâtonnier de l’ordre des avocats

Mesdames, messieurs les magistrats en vos grades et qualités respectifs

Honorables invités

Chers  Collègues participants,

Nous ne saurons commencer notre allocution,  sans vous exprimer   la joie profonde que nous  ressentons de vous avoir à nos côtés, pour partager, avec nous, ces quelques heures de  réflexions sur des questions qui, aujourd’hui, nous tiennent à cœur et dont cet atelier, que nous allons tenir, va s’évertuer de nous  apporter des solutions concrètes ;

Soyez remerciés infiniment d’avoir pu, chacun d’entre vous, puiser dans votre agenda chargé, un peu de temps, pour venir  nous gratifier de votre soutien ;

En effet parmi les nombreuses activités que nous, observateur national des lieux de privation de liberté, avons à initier, celle relative au désengorgement de ces lieux de détention nous semble revêtir une grande importance.

Il convient de rappeler que le Sénégal a été le premier pays africain notamment francophone à ratifier le protocole facultatif relatif à la convention de la torture et les autres peines ,traitements inhumains, cruels ou dégradants en 2006 et à mettre en place un mécanisme de prévention de la torture à travers la loi 2009-613 du 02 Mars 2009 et son décret d’application 2011-842 du 16 Juin 2011 instituant l’Observateur national des lieux de privation de liberté.

Qualifié d’autorité administrative indépendante, l’Observateur est chargé de contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de Liberté afin de s’assurer du respect de leurs droits fondamentaux et de prévenir la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains  ou dégradants. Dans son domaine de compétence, il émet des avis, formule des recommandations aux autorités publiques et propose au gouvernement toute modification des dispositions législatives et réglementaires applicables. Ces actions s’inscrivent dans les orientations du gouvernement, en matière de justice.

Il est à rappeler également que lors de la présentation par le Sénégal de son deuxième rapport au conseil des droits de l’homme au titre de l’examen Périodique Universel EPU, le 21 Octobre 2013, le groupe de travail avait interpellé l’Etat du Sénégal à respecter les engagements découlant de la convention contre la torture, à construire de nouvelles prisons et à intensifier l’application des peines alternatives à l’emprisonnement et de veiller à l’amélioration des conditions dans les prisons .

C’est dans ce contexte précis que se situe ce présent atelier qui vise à inciter les magistrats à prononcer et à faire appliquer les décisions tendant au désengorgement des prisons.

En effet, la problématique de la surpopulation dans les établissements pénitentiaires a, depuis de nombreuses années, retenu l’attention des acteurs judicaires.

Malgré les initiatives de relèvement de l’indemnité journalière des détenus, de construction et d’extension du parc pénitentiaire ainsi qu’une tendance à le moderniser, la situation est préoccupante.

Cet agrandissement du parc n’est pas la solution la plus pertinente  ni le moyen le plus efficace contre le surpeuplement des prisons ; même s’il n’est pas discutable que la construction de nouveaux établissements, conjuguée à la réhabilitation des prisons les plus vétustes peuvent conduire à une amélioration globale des conditions de détention;

La sur-occupation des cellules entraine une perte d’intimité et constitue sans nul doute un traitement cruel inhumain et dégradant. Les MAC du ressort de la Cour d’Appel de Dakar connaissent un surpeuplement assez marqué se traduisant dans les cellules par une surface moyenne disponible par détenu très faible.

L’impact de la surpopulation carcérale sur la promiscuité, l’insalubrité, la santé des détenus  apparait clairement dans nos nombreux rapports de visite ou monitoring des prisons et cela sur presque toute l’étendue du territoire.

Ce mal devenu endémique empêche à l’administration pénitentiaire  de respecter les standards pour séparer inculpés, prévenus et condamnés en tenant compte  de leur personnalité et des infractions commises.

Fort de ce constat, il apparait que le  moyen efficient de résoudre la surpopulation carcérale serait de permettre à des détenus condamnés à de courtes peines, moins d’un  an ou plus, de bénéficier d’aménagement  de peine. Théoriquement, il suffirait de convaincre les magistrats d’utiliser les instruments juridiques pour réduire le recours à l’incarcération et pour rationaliser la justice pénale, eu égard au respect des droits de l’homme, aux exigences de la justice sociale et aux besoins de réinsertion des délinquants.

En ratifiant les règles de Tokyo adoptées par l’Assemblée Générale le 14 Décembre 1990 et qui font référence au pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 Décembre 1966, le Sénégal s’est vu obligé d’entreprendre une réforme de son dispositif juridique en adoptant  les lois 2000-38 et 200-39 du 29 Décembre 2000 modifiant respectivement le code pénal et le code de procédure pénal ainsi que leur  décret d’application numéro 2001-362 du 04 mai 2001 relatifs aux procédures d’exécution et d’aménagement des sanctions pénales.

Toutefois, il  importe de relever que, malgré la mise en place de ces instruments  complétée par l’institutionnalisation de l’Observateur  des lieux de privation de liberté, comme rappelé ci-dessus, la surpopulation carcérale continue de préoccuper les acteurs du système judiciaire. De notre humble avis, il y  a une impérieuse  nécessité de maintenir la réflexion pour un diagnostic plus approfondie de la situation carcérale dans le ressort de Dakar,  en attendant d’élever, encore une fois, le débat au plan national en vue d’avoir des recommandations partagées et innovantes. Cet atelier d’envergure national se fera avec la collaboration des différentes directions du Ministère pour consolider la réflexion et avoir un plan d’action national participatif et cohérent ;

Ce constat lié à la surpopulation est alarmante d’autant plus que la criminalité globale dans le ressort suit une tendance à la baisse grâce aux mécanismes de prévention mis en place par les autorités gouvernementales. Cette surpopulation est incompatible avec  la nécessaire protection de la dignité des détenus. Un regard sur les notices et documents de l’administration pénitentiaire nous offre un aperçu de ce qui permet d’avancer, qu’avant d’exiger la création de nouvelles prisons, il faut faire un état des lieux de la situation en vue d’apporter des thérapies réalistes et à brève  échéance. La situation est d’autant plus préoccupante que notre système judiciaire est basée sur la prémisse qu’une personne est innocente jusqu’à preuve du contraire.

Il est dès lors légitime de se  demander pourquoi autant de personnes détenues provisoirement  se retrouvent à grands frais derrière les barreaux.

Désengorger les prisons ne signifie pas plus de laxisme, mais démontre que la prison est davantage réservée aux délinquants qui menacent la sécurité du public.

Le recours aux alternatives à la peine devrait assurer également une meilleure prise en charge sociale dans le règlement des problèmes et des conflits qui aboutissent devant les tribunaux. En effet prononcer l’ajournement de la peine après une condamnation pécuniaire assortie d’une contrainte par corps au maximum constitue une réelle alternative qui permet à l’auteur d’une infraction de réparer la faute pénale et de bénéficier ultérieurement d’une peine assortie du sursis ou carrément d’une dispense de peine ;

Il est  à regretter qu’aucune étude sérieuse n’ait évalué les peines que l’on prononce et les effets qu’ils produisent sur les personnes concernées .Des peines planchers sont instituées au mépris du principe d’individualisation des peines sans qu’on sache réellement si ces peines sont dissuasives et favorisent la réinsertion sociale.

L’objectif de cet atelier qui part d’un diagnostic sans complaisance concluant à une surpopulation carcérale est d’éviter, autant que possible, les incarcérations inopportunes, conformément à notre législation qui prévoit que la peine de prison doit être en matière correctionnelle un recours nécessaire.

Les recommandations de qualité qui sortiront de ces travaux contribueront sans nul doute à faire de la peine d’emprisonnement une sanction utile pour le condamné dans la perspective de sa réinsertion, notamment en garantissant des conditions de détention dignes et en promouvant des aménagements de peine de manière à organiser un retour à la liberté préparé, progressif, suivi et contrôlé, pour un nouvel équilibre.

Avant de conclure mes propos  permettez-moi de remercier les autorités judiciaires du ressort avec en première ligne, les Premiers Présidents Demba Kandji et Henri Grégoire Diop  qui n’ont ménagé aucun effort pour la tenue correcte de cet atelier ainsi que  tous les magistrats du ressort qui ont bien voulu répondre à notre invitation ;

Une mention spéciale à notre partenaire notamment la délégation de l’Union Européenne qui, à côté de l’Etat, nous appuie dans le cadre de ce projet pour faire face à la surpopulation carcérale ;

Egalement, nous remercions vivement et solennellement, le Garde des Sceaux Ministre de la justice Ismaila Madior Fall qui nous a fait l’honneur de présider cet atelier dont les conclusions sont fortement attendues et cela malgré son emploi du temps très chargé. Monsieur le Garde des sceaux, votre attachement au respect des droits humains est constant ;

Je vous remercie de votre aimable attention.

 

 

 

 

 

 

 

Allocution de bienvenue des participants Sédhiou

Monsieur le Préfet du Département de  Sédhiou ;

Monsieur le Président du Tribunal d’Instance de   Sédhiou ;

Monsieur le  Procureur de la République de   Sédhiou,

Honorables invités

Chers participants en vos grades et qualité respectifs ;

 

J’ai le plaisir de vous souhaiter à tous la bienvenue à cet atelier de formation, organisé dans le cadre du projet d’appui  du Fonds Opcat à l’Observateur national des lieux de privation de Liberté et,  par la même occasion, vous remercier, d’être venus rehausser de votre présence cette importante activité et, ce, malgré vos agendas très chargés ;

Je me réjouis également  d’avoir à participer au renforcement de la capacité de l’ensemble des participants, dans le domaine des droits de l’homme, ceci témoigne des relations étroites  qui existent entre les forces de défense et de sécurité et l’institution que j’ai l’insigne honneur de diriger.

La tenue de ce séminaire répond à notre volonté  constante de contribuer efficacement à l’éradication de la torture et des mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté.

Des améliorations quotidiennes sont notées dans l’accomplissement de vos missions mais des efforts restent à être accomplis  dans la prise en charge des personnes détenues, en particulier celles des personnes vulnérables ;

Le présent atelier qui est un espace d’échange permettra, sans nul doute, de lever des barrières pour une sensibilisation plus efficiente des agents d’exécution de la loi que vous êtes.

Depuis 2012, notre jeune institution a pu organiser dans le domaine de la formation et de la sensibilisation des séminaires à votre intention pour freiner certaines mauvaises pratiques attentatoires à la dignité humaine ;

Cet atelier vous donnera des outils nécessaires pour éviter de commettre des violations de droits humains pouvant engager votre responsabilité au plan pénal ou disciplinaire, voire même,  celle de l’administration que vous avez le privilège et l’honneur de servir ;

Soyez assurés que, grâce à l’expertise avérée des formateurs, vous saurez tirer bon parti de ces enseignements qui vous seront dispensés.

Enfin je souhaite que ce séminaire atteigne pleinement ses objectifs : à savoir le respect des droits et de la dignité des personnes privées de liberté, qui  ne sont autres, que des concitoyens, souvent, en conflit momentané avec la loi :

Je vous remercie de votre aimable attention

 

 

Allocution d’ouverture de l’Ecole des Sous-officiers fatick

Monsieur le Gouverneur (préfet)

Monsieur le Directeur du Centre annexe de l’Ecole des sous-officiers de la gendarmerie de Fatick.

Messieurs les Officiers et sous-officiers de la gendarmerie, en vos rangs et grades

Chers invités.

La torture, définie comme étant le fait, pour un agent public, d’exercer des violences physiques ou psychologiques sur une personne dans le but d’obtenir d’elle des renseignements ou des aveux, de lui faire subir des représailles, ou des actes d’intimidation ou de discrimination quelconque, est une méthode, hélas, encore utilisée, par les forces de l’ordre.

Or le Sénégal, attaché  à une longue tradition d’Etat de droit et ainsi soucieux de la promotion et de la protection de tous les droits humains, a très tôt ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture et son protocole facultatif, tout en votant la loi 2009-13 du 02 mars 2009, instituant l’Observateur National des Lieux de Privation de Liberté ; institution dont la mission est de prévenir la torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de privation de liberté.

C’est dans le cadre de ce mandat que l’observateur n’a eu de cesse, depuis sa création, d’entreprendre des missions de sensibilisation et de formation à travers tout le pays.

A ce titre, au courant du mois de juin 2019, mon équipe d’observateurs  délégués et moi-même avons fait bénéficié à cinq cent (500) élèves agents de police de l’école nationale de police de Thiès, d’une formation en droit humain,  notamment dans le cadre de l’exercice de la police administrative et judiciaire.

La session de cette semaine entre dans le même programme de formation des agents d’exécution des lois. Ainsi, L’ONLPL revient à l’école de gendarmerie de Fatick, après une première session tenue en 2018, avec cette fois-ci une cible privilégiée, car nous aurons à faire, non plus à des élèves gendarmes, mais à des élèves sous-officiers de la gendarmerie qui occuperont à leur sortie des postes de commandement et seront appelés à prendre, en toute autorité, des décisions de privation de liberté qui peuvent parfois, dans leur exécution, porter atteinte aux droits humains.

Donc partout, c’est l’occasion pour les observateurs de rappeler aux responsables et aux agents leurs devoirs de veiller au respect des droits des personnes privées de liberté et de les inviter à être professionnels dans les actes qu’ils posent.

En effet, il est depuis longtemps admis que le respect des droits humains par ceux qui détiennent la puissance publique ne va pas de soi. J’en veux pour preuve que récemment l’intervention de la gendarmerie à Koumpentoum pour retrouver les individus suspectés d’avoir lâchement tué le commandement de brigade, tombé dans l’exercice de ses fonctions, s’est faite sous de fortes allégations de torture.

Par le passé, Dominique LOPY est décédé des suites de torture dans les locaux du commissariat de Kolda, le 13 avril 2007 ; Ibrahima SAMB aurait été torturé à mort par quatre policiers à Mbacké en 2013.

Je demeure convaincue que c’est seulement par le biais de la formation, voir de la sensibilisation que nous pourrons acquérir la culture des droits humains et ainsi ériger les remparts contre toute atteinte à la dignité, à l’intégrité physique ou aux autres droits de la personne humaine.

Monsieur le gouverneur, en me faisant l’honneur de présider la cérémonie d’ouverture de cette session de formation, vous témoignez de votre dévouement personnel et, si besoin en était encore, de l’engagement de l’Etat du Sénégal dont vous êtes le plus illustre représentant au niveau régional, a toujours œuvrer  pour la promotion et la préservation des droits humains.

Soyez en donc remercié,

Monsieur le Directeur, en autorisant les élèves sous-officiers de la gendarmerie placés sous votre autorité, à bénéficier de cette formation, vous montrez votre désir de maintenir, haut, le flambeau de la gendarmerie sénégalaise qui a toujours brillé magnifiquement aussi bien au niveau national, qu’ au niveau international, lors des missions de maintien de la paix dans les zones instables, où nos agents se sont illustrés par leur professionnalisme, leur courage et leur discipline.

Je vous exprime aussi ma  gratitude pour votre engagement sans faille à la bonne tenue de cette session de formation. Ce faisant vous montrez, d’ores et déjà à vos élèves, la voie à suivre dans l’exercice de leurs futures missions.

Je voudrais aussi profiter de cette tribune pour remercier le HCDH-BRAO, en la personne de son représentant, Monsieur Andréa ORI, un partenaire de tous les jours, dont l’appui technique et financier a décisivement contribué à la tenue de cet atelier de formation.

Enfin, aux élèves sous-officiers de la gendarmerie, je formule mes encouragements à toujours préserver dans la culture des droits humains.

Dans l’exercice prochain de vos missions, vous serez détenteurs de la force publique et, à ce titre, vous serez autorisés, dans des conditions clairement définies par la loi, à porter atteinte à la liberté et aux autres droits de vos concitoyens.

Mais en le faisant, ne perdez jamais de vue que vous avez prêté serment de servir avec honneur et que votre vocation est de protéger l’Etat et vos concitoyens dans le respect de leurs droits et liberté.

Gardez toujours à l’esprit que le citoyen en conflit avec la loi, n’en demeure pas moins un sujet de droit. Des droits que vous êtes tenus de protéger en les conciliant avec les devoirs de votre mission de préservation de l’ordre et de la paix publics.

Comme je vous l’ai dit cela ne va pas de soi. Et c’est seulement par la formation que vous acquerrez les outils qui vous permettront de faire la part des choses.

Alors, je souhaite vivement que la formation qui vous sera donnée contribuera à renforcer vos capacités sur les droits humains afin de mieux vous préparer à l’exercice prochain de vos missions.

Je vous remercie de votre aimable attention.

A propos de l’Observateur

A propos de l’Observateur National

L’Observateur National des Lieux de Privation de Liberté est une autorité administrative indépendante instituée par la loi n°2009-13 du 02 mars 2009.

Magistrat de formation, Monsieur MADIAW DIAW est nommé Observateur national par décret présidentiel    n° 2022-1189, en date du 1er Juin 2022.

 

Une autorité administrative indépendante

Nommé pour cinq ans non renouvelable, il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l’expiration de son mandat, qu’en cas de démission ou d’empêchement. L’Observateur national exerce sa mission sans recevoir d’instruction d’une quelconque autorité.

L’Observateur national ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit dans l’exercice de ses fonctions.

 

Assisté d’une équipe pluridisciplinaire

Dans l’exercice de ses fonctions, l’Observateur national bénéficie de l’assistance d’une équipe pluridisciplinaire d’observateurs délégués.

Qui veille au respect des droits fondamentaux

L’Observateur national contrôle les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de Liberté et exerce les missions de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Droit à la dignité, à la liberté de pensée et de conscience, au maintien des liens familiaux, aux soins, a l’exercice d’un culte, à l’épanouissement

Lieux susceptibles d’être visités par l’Observateur National

L’Observateur national peut effectuer une visite de manière programmée ou inopinée dans les lieux de privation de Liberté suivantes :

  • les Etablissements pénitentiaires,
  • les Etablissements de santé habilités à recevoir des patients hospitalisés sans leur consentement,
  • les locaux de garde à vue (Police, Gendarmerie),
  • les locaux de rétention douanière,
  • les dépôts des tribunaux,
  • les Centres fermés pour mineurs,
  • les Centres et locaux de rétention administrative,
  • tous les moyens de transport servant au transfèrement d’une personne privée de Liberté,
  • les locaux disciplinaires dans les camps militaires ou paramilitaires.

Ce qui peut justifier la saisine de l’Observateur National

Vous pouvez saisir l’Observateur national lorsque vous êtes au courant d’une situation :

  • qui porte selon vous, atteinte à vos droits fondamentaux ou aux droits fondamentaux d’une autre personne privée de Liberté ;
  • liée au fonctionnement d’un Etablissement ou d’un service, à l’attitude des personnels ou de personnes détenues,
L’Observateur national ne peut, par contre, ni intervenir dans le cadre d’une procédure judiciaire en cours, ni apprécier le bien-fondé d’une décision de justice.
Qui peut saisir l’Observateur National ?

Les particuliers :

– les personnes privées de liberté elles-mêmes, leurs parents, leur famille, leur avocat, un témoin, les personnels et toutes personnes intervenants dans ces établissements;

– les autorités publiques :

  • le Président de la République,
  • les membres du Gouvernement,
  • les membres du Parlement,
  • le Médiateur de la République.

L’Observateur national peut aussi s’autosaisir.

 

Comment saisir l’Observateur national ?

L’Observateur national est saisi par :

  • courrier ordinaire,
  • ou avec avis de réception.

Ces courriers sont adressés au siège de l’Observateur national. Il peut être également saisi par voie téléphonique ou par courriel sous réserve de régulariser ladite saisine ultérieurement par courrier adressé au siège.

Vous pouvez saisir l’Observateur National, directement à l’occasion des visites effectuées dans les établissements. Vous pouvez solliciter un entretien confidentiel avec elle ou avec l’un des observateurs délégués. L’information relative à ces visites est faite par voie de presse ou par voie d’affichage et dans les établissements et les locaux d’accueil des familles.
Les moyens d’actions de l’Observateur National :
  • il procède à des enquêtes auprès des autorités concernées ;
  • il effectue des visites programmées ou inopinées des Lieux de Privation de Liberté ;
  • il adresse aux ministres des rapports et recommandations qu’elle peut rendre public ;
  • il peut porter à la connaissance du Procureur de la République ou des instances disciplinaires des faits qui pourraient constituer une infraction ou une faute commise par un personnel dans l’exercice de ses fonctions.
Les textes de référence
l’Observateur remet chaque année un rapport d’activité au Président de la République.

Ce rapport est rendu Public.

Loi n* 2006-13 du 30 juin 2006 – Autorisant le Président de la République à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradant, adopté par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 18 décembre 2002.
Loi n*2009-13 du 02 mars 2009 Portant sur l’Observateur National des Lieux de Privation de Liberté.
Décret n* 2011-842 du 16 juin 2011 Portant application de la loi 2009-13 instituant l’Observateur Nationale des Lieux de Privation de Liberté.
Décret n* 2022-1189 du 1 Juin 2022 Portant nomination de l’Observateur National des Lieux de Privation de Liberté (ONLPL).

Avenue Georges Pompidou. Immeuble Yoro Lam. 1 er étage.

BP 36 045. Dakar- building – SENEGAL.

Telephone : 33 823 69 43 – FAX : 33 823 69 48

e-mail : onlpl54@yahoo.fr- Site web : www.onlpl.sn

Textes et règlements

II° – Organisation

 1- Personnel

Article 2

Le nombre d’emplois permanents est déterminé par l’observateur national.

Parmi les agents employés à titre permanent, l’observateur national nomme :

  • Des observateurs délégués permanents ;
  • Un secrétaire général, chargé de le suppléer dans tous les aspects de sa mission et d’assurer la gestion de l’institution et notamment la confection du rapport annuel;
  • Un chef des services d’enquête et de suivi, chargé notamment de l’instruction des requêtes et de leur suivi ;
  • Un chef des services financiers, chargé de l’élaboration du budget et de son exécution et des aspects matériels de la gestion de l’observateur national;
  • Un chargé de communication ;
  • Un chef des services courrier et liaison; responsable de la saisie et de la distribution de toutes les correspondances de l’observateur national. Il assure la photocopie, le classement, la conservation de tous les documents et leur distribution à tous les responsables concernés ;
  • Des assistantes ;
  • Des chauffeurs ;
  • Toute personne dont l’observateur national aurait besoin pour le bon accomplissement de sa mission ;

Article 3

L’observateur national peut s’adjoindre des intervenants extérieurs, appartenant ou non à l’administration, qui lui apportent, en qualité de d’observateurs délégués extérieurs, leurs concours de façon continue ou intermittente, sans renoncer à leur occupation principale.

Article 4

Comme il est dit à l’article 15 ci-dessous, l’observateur national peut accueillir des stagiaires de longue durée, ayant accompli au moins quatre années d’enseignement supérieur, choisis pour leur motivation et leur faculté de s’adapter aux missions de l’observateur national. Le stage ne peut être inférieur à trois mois ni excéder six mois.

Article 5

Sans préjudice d’autres formes d’échanges, les agents de l’observateur national sont réunis par l’observateur national une fois par mois environ. Les réunions ont pour ordre du jour le traitement des saisines, les questions de méthode relatives aux visites, les comptes-rendus de ces dernières, la préparation des recommandations et du rapport annuel et toute question utile au fonctionnement de l’observateur national.

 

  • 2. Budget

Article 6

Les ressources de l’observateur national sont versées au compte de dépôt à vue ouvert dans les livres du trésor public. Les dépenses sont engagées par l’observateur national ou les agents à qui il donne délégation expresse à cette fin.

Le chef des services financiers de l’observateur national assure la bonne tenue des comptes

  • 3. Relations extérieures

Article 7

Outre les personnes rencontrées au cours des enquêtes et des visites, l’observateur national entretient des relations régulières :

  • avec les organisations professionnelles concernées et les ordres professionnels des médecins et avocats ;
  • avec les écoles ou instituts de formation aux droits humains ;
  • avec les associations nationales dont l’objet social est d’intervenir en tout ou partie dans les lieux de privation de liberté ou de défendre et promouvoir les droits des personnes privées de liberté;
  • avec les représentants des cultes présents dans les lieux de privation de liberté.

Il recueille, en outre, aussi régulièrement que possible, les opinions et contributions de chercheurs pour lesquels les lieux de privation de liberté sont un objet d’intérêt.

Article 8

L’observateur national coopère sous diverses formes avec :

  • les « mécanismes nationaux de prévention » (issus du Protocole facultatif à la convention des Nations Unies contre la torture « OPCAT ») ;
  • le Sous Comité des Nations Unies pour la prévention de la torture (SPT) ;
  • les Organes d’application des traités des droits de l’homme des Nations Unies, les Mécanismes thématiques et Mécanismes spécifiques de la Commission des droits de l’homme, notamment le Rapporteur spécial sur la torture
  • les organes compétents de l’Union africaine, notamment la Commission africaine des droits de l’homme, le Comité Africain de prévention de la torture (CAPT), le rapporteur spécial sur les prisons et les conditions de détention en Afrique, et la Cour africaine des droits de l’homme ;
  • Toute personne morale, publique ou privée, nationale, étrangère ou internationale, ayant pour objectif la prévention de la torture et la protection des droits fondamentaux de la personne.

Le ministère des affaires étrangères est tenu informé des modalités et des développements de cette coopération.

 

  • 4. Communication

 Article 9

L’observateur national administre un site Internet destiné notamment à mettre à la disposition du public les informations sur son activité et les rapports rendus publics.

Les relations avec les organes de presse se font dans le respect du secret professionnel qu’impose la loi 2009 – 13 du 02 mars 2009 et de la protection due aux personnes qui l’ont saisi par courrier ou rencontré lors des visites.

 

  • 5. Recommandations, propositions et observations

 Article 10

Selon la forme qu’il estime la plus appropriée, l’observateur national formule des recommandations et présente des propositions et observations aux autorités compétentes.

Article 11

L’observateur national présente son rapport annuel au Président de la république, le premier trimestre de chaque année.

 

Titre 2 : Compétences

 I° – Les visites

  • 1. Choix des lieux visités

Article 12

Le choix des lieux faisant l’objet d’une visite appartient à l’observateur national.

Article 13

Les visites ont lieu à tout moment, dans tout lieu privatif de liberté ou tout moyen de transport servant à un transfert, même temporaire ou irrégulier, quelle que soit son implantation ou son affectation sur le territoire national.

 

  • 2. Observateurs mandatés pour effectuer les visites

Article 14

Le nombre d’observateurs mandatés par l’observateur national pour effectuer la visite d’un lieu de privation de liberté n’est jamais inférieur à trois, quelle que soit les dimensions de l’établissement visité. La composition des équipes chargées d’effectuer les visites est variable et aucun observateur n’est spécialisé ni dans une catégorie d’établissement, ni pour un secteur géographique déterminé. Leur nombre est adapté à la taille de l’établissement.

Pour chaque lieu visité, l’observateur national désigne parmi les observateurs mandatés un chef de mission.

Chaque observateur mandaté est  doté :

  • d’une carte professionnelle délivrée par l’observateur national comportant une photographie permettant de l’identifier ;
  • d’une lettre de mission rappelant l’objet de la visite et les prérogatives dont il dispose, signée de l’observateur national ou, en cas d’absence ou d’empêchement, du secrétaire général.

Article 15

Les autres agents mis à la disposition de l’observateur national ou recrutés par lui peuvent participer aux visites dans les mêmes conditions que les observateurs délégués. Dotés également d’une carte professionnelle et d’une lettre de mission, ils disposent des mêmes prérogatives et sont soumis aux mêmes obligations.

Participent également aux visites, sous la responsabilité directe du chef de mission, les personnes accueillies au sein de l’observateur national en qualité de stagiaires de longue durée dès lors qu’ils y sont affectés à des tâches permanentes et qu’ils y ont effectué au moins six semaines de présence.

Peuvent également participer, à titre exceptionnel, aux visites des personnalités de nationalité étrangère appartenant à un « mécanisme national de prévention » au sens des stipulations de l’article 18 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, ou toute autre personne dont l’activité principale a pour objet de concourir à la prévention de la torture ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants.

 

  • 3. Préparation de la visite

Article 16

Les visites peuvent être ou bien programmées ou bien inopinées.

En principe, les visites d’établissements dans lesquels l’état des lieux et des personnes est susceptible d’être modifié rapidement doivent être inopinées. Dans les autres, elles peuvent ou non faire l’objet d’un préavis. Celui-ci, lorsqu’il existe, est donné par correspondance, adressée au chef d’établissement.

Article 17

La correspondance adressée en guise de préavis contient à minima :

  • Le nom des observateurs désignés pour effectuer la visite et, parmi eux, celui du chef de mission
  • le jour et l’heure approximative d’arrivée dans les lieux ;
  • la liste des documents dont l’observateur national souhaite disposer avant la visite ;
  • une affiche destinée à aviser les personnes privées de liberté de la venue de l’observateur ; dans les établissements pénitentiaires, cette affiche doit être distribuée en cellule ; dans tous les établissements, elle doit être apposée dans des lieux visibles et fréquentés par les personnes auxquelles elle est destinée ;
  • une affiche destinée à informer les personnels et apposée dans les mêmes conditions ;
  • une affiche propre à informer les familles et apposée dans les sites fréquentés par elles.

 

Article 18

Le chef de mission est responsable de la préparation matérielle de la visite, du choix des horaires et de la durée de présence. Celle-ci peut varier avec les conditions de la visite sur les lieux.

Il lui appartient de rassembler et consulter la documentation, notamment les correspondances relatives au lieu choisi et adressées à l’observateur national.

Il sollicite le chef des services financiers pour que soit mis à la disposition des observateurs les documents et le matériel nécessaire. Ce dernier comprend, notamment, des appareils photographiques et, éventuellement, de prise de vues, des appareils d’enregistrement sonore et des appareils de mesure du bruit, de la température et de l’humidité, dont l’entrée dans l’établissement doit être autorisée sans restriction, conformément aux instructions du ministre responsable.

Le chef de mission s’assure, avant le départ, des conditions dans lesquelles les observateurs seront hébergés et transportés durant leur séjour sur place.

Il organise, en accord avec les observateurs, la répartition de la rédaction des différentes parties du rapport à venir, par la répartition des rubriques des différentes grilles confectionnées à l’observateur national pour les visites d’établissement.

Il est, durant la mission, l’intermédiaire entre celle-ci et l’observateur national ou, en cas d’absence, le secrétaire général.

 

  • 4. Déroulement de la visite

Article 19

Lorsque l’accès à un établissement est refusé aux observateurs, le chef de mission en avise sans délai l’observateur national, lequel arrête avec lui les dispositions nécessaires. Il en va de même lorsque les observateurs renoncent eux – même, pour quelque motif que ce soit, à effectuer ou à poursuivre la visite

Article 20

Avant le début de la visite, le chef de mission avise, dès que possible, le représentant de l’Etat dans le département ou la collectivité et le procureur de la République près le tribunal régional  du ressort. S’agissant d’un établissement de santé, il informe, en outre, le médecin chef de région. Il laisse au chef d’établissement le soin d’aviser sa propre hiérarchie et toute autre personne.

Article 21

Lorsque la visite est inopinée, les contrôleurs ou, au moins, l’un d’entre eux, doi (ven) t visiter sans délai les lieux de l’établissement où les droits fondamentaux des personnes sont les plus susceptibles d’être méconnus.

Article 22

Lorsque la visite est sujette à préavis, elle commence par une réunion entre tous les observateurs, d’une part, le chef d’établissement et ses principaux collaborateurs, d’autre part. Pendant cette réunion, sont rappelés le rôle de l’observateur national les objectifs et le déroulement de la visite et décrite, à la diligence du chef d’établissement, une vue synthétique de l’établissement et de ses caractères au jour de visite. Après son terme, un tour rapide de l’ensemble de l’établissement peut être réalisé, sous la conduite du chef d’établissement ou d’un cadre désigné par lui.

Article 23

Au cours de leur visite les observateurs doivent :

  • avoir libre accès à toutes les parties de l’établissement, sans aucune restriction possible, à toute heure du jour et de la nuit, que ce soit en groupe ou de manière isolée et sans être accompagnés, le cas échéant, par aucun membre du personnel ; tester ou faire tester, au moins brièvement, les équipements nécessaires à la vie quotidienne des personnes privées de liberté ;
  • pouvoir rencontrer toute personne de leur choix, au moment qui leur convient, sans limite de temps et dans les conditions qui assurent à l’entretien une rigoureuse confidentialité, hors de toute présence extérieure; les entretiens sont soumis au seul accord de la personne en cause ;
  • avoir accès à tout document, à l’exclusion de ceux couverts par les secrets limitativement énumérés par l’article 6 de la loi 2009 – 13 du 02 mars 2009, en particulier le secret médical ; les documents sont, sous cette réserve, accessibles quel que soit leur état et leur statut et quelle que soit leur forme ; s’agissant des documents numérisés, il appartient à l’observateurs de solliciter du chef d’établissement, qui ne peut leur refuser, les clés d’accès par ordinateur et les éléments de codage dont ils ont besoin ; les procès-verbaux de garde à vue leur sont accessibles, sous réserve de ceux qui sont relatifs au fond de l’éventuelle infraction ; il est loisible à l’observateurs de demander toute copie de document qui leur serait nécessaire, sans que le chef d’établissement puisse s’y opposer ;
  • pouvoir prendre et consigner toute mesure de nature à faciliter le constat de l’état des lieux et des moyens de transport utilisés, pouvoir prendre toute photographie ou tourner toutes images, sans autres limites, pour tous les établissements, que les dispositions des lois en vigueur relatives au droit à l’image, au respect de la vie privée et à la protection de la dignité des personnes.

 

Dans la mesure où elles ne constituent pas un obstacle au déroulement de leur mission, les observateurs se conforment strictement aux mesures de sécurité et d’hygiène en vigueur et à toutes les consignes données par le personnel ; ces mesures et consignes ne peuvent, en tout état de cause, limiter la liberté d’accès aux lieux, personnes, documents et constats mentionnés aux alinéas précédents, y compris lorsqu’elles seraient données pour garantir la sécurité des observateurs, que ces derniers doivent être seuls à apprécier en dernier lieu

Article 24

Au cours de la visite, les observateurs ne se départissent pas du sang-froid, de la neutralité et de la courtoisie qui s’imposent. Ils font application, en matière d’attitude et de jugement à l’égard des personnes, des principes déontologiques applicables à l’observateur national. Ils s’interdisent tout propos ou tout geste de nature à méconnaître le secret professionnel auquel ils sont soumis. Ils s’acquittent des frais exposés, le cas échéant, pour les repas pris dans les lieux de restauration destinés aux personnels et ne peuvent accepter de prise en charge d’aucun frais par l’établissement objet de la visite.

Article 25

Les entretiens qu’ils doivent avoir avec des agents du personnel ou des tiers intervenants peuvent se dérouler, à la diligence des observateurs, hors de l’établissement visité et hors du temps de la visite.

Il leur appartient de définir, au mieux des circonstances, les personnes à rencontrer. Ils devront, sauf impossibilité, entrer en relation dans tous les cas avec les magistrats intéressés du ressort du lieu visité, le barreau, les associations, les responsables d’activités, les représentants des cultes et, plus généralement, toute personne susceptible d’apporter un témoignage sur l’effectivité du respect des droits fondamentaux dans le lieu visité.

L’observateur national et le chargé de la communication sont avisés immédiatement de toute sollicitation de médias à l’occasion d’une visite.

Lorsque les observateurs ont constaté, de la part d’agents publics membres du personnel ou d’agents privés agissant dans le cadre du service public, dûment identifiés, des écarts sensibles avec les comportements qu’exige le respect des droits fondamentaux des personnes privées de liberté, voire des violations de ces droits, le chef de mission en fait part au cours d’un entretien particulier avec le chef d’établissement, soit pour lui demander de mettre fin à la situation dénoncée et d’en rendre compte, soit pour lui indiquer que l’observateur national demandera à l’autorité ministérielle compétente l’engagement de poursuites disciplinaires, soit enfin porter les faits sans délai à la connaissance du procureur de la république conformément à l’article 32 du code de procédure pénale.

.

  • 5. Suites de la visite

Article 26

La visite se termine, sauf impossibilité matérielle, par un entretien entre le chef de mission, éventuellement assisté par l’équipe qui l’accompagne, et le chef d’établissement, au cours duquel doit être présenté le déroulement de la phase de préparation par l’observatoire national du rapport de visite, questionné l’administration sur d’éventuels choix de gestion observés ou obscurités subsistantes, éventuellement donné un aperçu des premiers constats et enfin soumis à règlement quelques situations individuelles urgentes.

Les observateurs prennent toute disposition pour rester en relation utile avec leurs interlocuteurs de l’établissement, en particulier pour que soit assurée la protection mentionnée à l’article 21 du Protocole facultatif sus-mentionné

Article 27

Pour donner suite aux entretiens au cours desquels des demandes ont été formulées qui n’ont pas reçu satisfaction durant leur séjour dans l’établissement, les observateurs procèdent comme il est dit à l’article 39 ci-dessous.

Article 28

Il  appartient au chef de mission de remplir les fiches matérielles qui témoignent de la bonne exécution de la mission et de restituer les matériels nécessaires à la visite au chef des services financiers de l’observatoire national. Il rend compte de toute difficulté survenue au cours du transport, du séjour ou de la visite. Il lui appartient, en outre, de veiller à la rédaction par les observateurs, le plus rapidement possible, des parties du rapport de constat qui leur incombe et de les rassembler ensuite pour parvenir à une rédaction commune, en formalisant de manière aussi générale que possible les observations, en prohibant toute référence à quelque personne physique que ce soit et en choisissant ensemble les principaux constats à établir.

Article 29

Le projet de rapport, ainsi élaboré, appelé « pré-rapport » ou « rapport de constat », est soumis à l’observateur national qui l’envoie ensuite au chef de l’établissement visité, pour recueillir de lui les observations sur les constats matériels effectués lors de la visite.

Un délai d’un mois, sauf circonstance particulière, est imparti au chef d’établissement pour répondre.

Article 30

Après réception des observations du chef d’établissement, ou en l’absence de réponse de ce dernier, le chef de mission réunit à nouveau les observateurs ayant effectué la visite, pour rédiger les conclusions ou recommandations dont est assorti le rapport final, dit « rapport de visite ».

Le rapport de visite est envoyé par l’observateur national aux ministres ayant compétence dans tout ou partie des constats et des recommandations qui y figurent. Il fixe aux ministres, un délai de réponse, compris, hors cas d’urgence, entre cinq semaines et deux mois.

Les observations ministérielles sont annexées au rapport de visite.

Article 31

Lorsque les recommandations ne sont pas publiées, les conclusions du rapport de visite tiennent lieu de recommandations adressées aux ministres au sens de l’article 8 de la loi 2009 – 13 du 02 mars 2009, sauf procédure expresse contraire.

Article 32

L’observateur national se réserve la possibilité, dans un délai de six mois après la visite, de publier ou bien dans le rapport annuel, ou bien par tout autre moyen, l’intégralité des rapports de visite et des recommandations assortis des observations ministérielles qu’il a reçues, afin de les porter à la connaissance du public.

 

II° – Saisine

Article 33

L’observateur national peut être saisi par toute personne physique : les personnes privées de liberté elles-mêmes, leurs parents, leur avocat, les personnels et toutes personnes intervenant dans les lieux de privation de liberté

Peuvent également saisir l’observateur national :

  • les associations ou toutes autres personnes morales ayant pour objet le respect des droits fondamentaux.
  • les autorités publiques notamment le  Président de la République, le Premier Ministre les membres du Gouvernement, les parlementaires, le médiateur de la République.

Il peut également se saisir de sa propre initiative.

Article 34

Les démarches tendant à porter à la connaissance de l’observateur national des lieux de privation de liberté les faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence, font l’objet de lettres ordinaires ou avec avis de réception adressées au siège de l’observateur national.

L’observateur national ou, en cas d’absence de celui – ci, le secrétaire général les reçoit et décide de leur orientation au sein de ses services.

Article 35

Les lettres donnent lieu à un examen et à une première réponse de fond aussi rapide que possible. A cette fin, le chef des services d’enquête et de suivi, qui a la responsabilité du service du courrier, établit trimestriellement un état statistique du nombre de saisine et des délais de réponse.

Article 36

L’observateur national et les agents ayant reçu délégation à cette fin signent les lettres qui peuvent :

  • écarter la compétence de l’observateur national, en particulier, sur le fondement de l’article 1er de la loi 2009 – 13 du 02 mars 2009, lorsqu’une autorité judiciaire ou juridictionnelle est déjà saisie de la même affaire ;
  • répondre sur le fond aux sujets évoqués.

Article 37

Lorsque la saisine implique des vérifications ou investigations complémentaires permettant de disposer de l’appréciation la plus objective possible de la situation qui lui est soumise, l’observateur national peut solliciter de toute personne qui lui paraît susceptible de les détenir les informations qui lui sont nécessaires. Conformément au quatrième alinéa de l’article 6 de loi du 2009 – 13 du 02 mars 2009, le caractère secret des informations ne peut être opposé à ces demandes.

L’observateur national peut solliciter la communication de toute information relative aux modalités d’accès aux soins. Toutefois, en application des dispositions de l’article 6 de la même loi, aucune information couverte par le secret médical ne peut être demandée ni obtenue.

Article 38

Si l’observateur national estime que les renseignements qui lui sont communiqués ne sont pas de nature à lui permettre de répondre sur le fond à l’affaire dont il est saisi, il peut ordonner une enquête sur place.

Dans cette hypothèse, des chargés d’enquête, délégués par lui, se rendent dans tout lieu nécessité par les besoins de l’enquête, pour y rencontrer toute personne et se faire communiquer tout document, dans les conditions et sous les seules réserves mentionnées au troisième et quatrième alinéa de l’article 6 de la loi 2009 – 13 du  02  mars 2009.

L’auteur de la saisine est avisé préalablement, sauf circonstance particulière, de cette enquête et il est, dans la mesure du possible, entendu sur place par les chargés d’enquête, lesquels procèdent en outre à toute démarche qui leur paraît enrichir la connaissance de l’affaire dont ils sont saisis et contribuer à un éventuel règlement.

Article 39

Les entretiens réalisés par les observateurs, lors des visites d’établissement, avec des personnes privées de liberté, peuvent donner lieu à saisine lorsqu’il est estimé que les questions soulevées ne peuvent recevoir de solution au cours du déroulement de la visite.

Pour matérialiser la saisine, les observateurs ayant effectué la visite adressent, dès la fin de celle-ci, une fiche retraçant les conditions de l’entretien, l’objet de l’affaire, ainsi que l’accord de la personne pour qu’une suite soit donnée, au chef du service enquête et de suivi, qui a la responsabilité de son traitement, dans les conditions prévues aux articles 34 et suivants ci – dessus.

Article 40

Pour des motifs de traçabilité des saisines et de clarté dans leur traitement, les demandes adressées à l’observateur national par messages électroniques ou téléphoniques, ne donnent lieu à aucune suite avant d’avoir été, le cas échéant, confirmées par courrier écrit dans un délai de 15 jours.

Toutefois l’observateur national indique à ses correspondants la voie à suivre pour le saisir utilement.

Il s’efforce de diffuser largement son adresse postale par tous moyens, dans les lieux de privation de liberté, au bénéfice des populations qui y sont retenues et des personnels.

Article 41

La confidentialité des correspondances entre l’observateur national et toute personne, qu’elle soit privée de liberté ou non, doit être observée.

Il en résulte que :

  • toute personne peut écrire directement à l’observateur national, autant de fois qu’elle le souhaite, sans recourir aux règles, si elles existent, d’acheminement par la voie hiérarchique ; la réponse peut lui être directement adressée ;
  • les agents rattachés à l’observateur national et les observateurs délégués sont assujettis au secret professionnel le plus strict pour les informations qu’ils sont amenés à connaître dans le cadre des saisines ;
  • l’observateur national, ainsi que les observateurs délégués, lors des visites, prennent par tout moyen approprié, les mesures nécessaires pour la protection des personnes qui les saisissent, conformément aux stipulations de l’article 21 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture.

 

A propos de l’Observateur National

L’observateur national des lieux de privation de liberté.

Le Sénégal Etat partie de la Convention des Nations unies, en ratifiant le 18 Octobre 2006, le protocole facultatif de ladite convention (OPCAT), a mis en place un mécanisme national de prévention contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains et dégradants qui est, «  l’Observateure Nationale des Lieux de Privation de Liberté » ou (ONLPL).

Le 1ere février, j’ai été nommée par décret présidentiel n° 2017-187, en remplacement de mon prédécesseur, Monsieur Boubou Diouf TALL, magistrat comme moi, admis à faire valoir ses droits à la retraite, pour prendre en main les destinées de cette institution.

Autorité administrative indépendante par la loi n° 2009, je suis appelée, avec l’assistance de mon équipe d’observateurs délégués multidisciplinaires, à effectuer ma mission sans recevoir d’instruction ni de l’Administration, ni du gouvernement ; cette indépendance s’illustre par le fait que je suis nommé pour une durée de cinq ans non renouvelables, sans possibilité de révocation, sauf pour démission ou empêchement.

Quel est mon rôle ?

Avec mon équipe d’observateurs délégués, j’ai pour mission de :

  • Contrôler les conditions de prise en charge et de transfèrement des personnes privées de liberté afin de m’assurer du respect de leurs droits fondamentaux et de prévenir la torture ou les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
  • Rendre des visites régulières dans les lieux de privation de liberté, sur l’étendue du territoire national où se trouvent des personnes privées de liberté, par décision d’une autorité publique, ainsi que dans tout établissement de santé, habilité à recevoir des patients hospitalisés sans leur consentement ; ces visites sont programmés ou inopinées ;
  • Organiser des journées de sensibilisation et de formation de certains agents d’exécution des lois, par exemple, dans les domaines de la prévention et de la répression de la torture et autres traitements assimilés ;
  • Émettre des avis et recommandations aux autorités publiques et pouvoir proposer au gouvernement toute modification des dispositions législatives et réglementaires favorables à l’amélioration des conditions des personnes privées de liberté ;
  • Produire chaque année un rapport, le remettre au Président de la République et le rendre public.

Comment me saisir ?

Vous êtes personne physique ou morale, au courant d’une situation dans un lieu de privation de liberté et vous voulez m’en informer, vous pouvez me saisir par courrier ordinaire adressé au siège de l’Observateur, par courriel ou par voie téléphonique.

Rapport de visite du SPT// Réponse de l’ONLPL

Conformément au mandat que lui confère le Protocole facultatif se rapportant à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de visiter les lieux de privation de liberté se trouvant dans les Etats parties ou sous la responsabilité de ceux-ci, le Sous-comité des Nations Unies pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (SPT) a effectué sa deuxième visite au Sénégal du 05 au 16 mai 2019. Celle-ci lui a permis d’analyser le mode de fonctionnement de l’Observateur national des Lieux de Privation de Liberté (ONLPL), ses méthodes de travail, son mandat et les moyens d’améliorer son efficacité, mais aussi, de visiter trois lieux de privation de liberté en compagnie de membres de l’ONLPL. En application des dispositions de l’article 11 du Protocole facultatif, le SPT a établi le rapport CAT/OP/SEN/RONPM/R.1 daté du 30 septembre 2020 contenant des avis, observations et recommandations, en vue de renforcer les capacités et le mandat de l’ONLPL, pour sa meilleure contribution à la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de privation de liberté. Cet important document ainsi que les réponses qui lui sont apportées par l’ONLPL, sont disponibles dans le site de l’Observateur national : www.onlpl.sn » et dans celui du SPT. L’Observateur national des Lieux de Privation de Liberté remercie vivement le SPT pour son appui et son assistance.