Dans un récent avis, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté dénonce le non-respect des droits fondamentaux des détenus handicapés. Elle recommande qu’ils puissent purger leur peine hors de prison.
Il y a ce détenu en fauteuil roulant qui ne peut accéder au coin sanitaire de sa cellule en raison d’une marche à franchir. Pour se laver, il n’a d’autre solution que de s’arroser avec un tuyau relié au lavabo, en inondant le sol. Mais aussi cet homme hémiplégique qui doit compter sur l’aide de son codétenu pour parvenir à son matelas. Ou ces septuagénaires souffrant de troubles cardiaques dormant dans des lits superposés difficiles d’accès.
Dans un avis publié le 22 novembre au Journal officiel, Adeline Hazan, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, alerte sur les conditions de détention de personnes en situation de dépendance due à l’âge ou à un handicap. Une fois de plus.
La France condamnée par la Cour européenne
Son prédécesseur avait déjà dénoncé, en 2013, une « prise en charge généralement peu adaptée à leur état ». La même année, le Défenseur des droits avait dressé le même constat. Et en 2015, la Cour européenne des droits de l’Homme avait condamné la France. Pour elle, l’insuffisance de soins avait conduit à un niveau de souffrance dépassant celui inhérent à une privation de liberté.
L’aide humaine apportée par des professionnels
Adeline Hazan rappelle donc leurs obligations aux pouvoirs publics. Que les détenus dont le handicap le nécessite soient hébergés dans des cellules adaptées, notamment. Quant à l’aide humaine, des professionnels doivent l’assurer. Et non un codétenu bénévole ou un auxiliaire du service général, non formés et non supervisés.
Le Conseil de l’Europe a d’ailleurs adopté en juin 2018 une résolution sur les détenus handicapés. Elle y engage les États à « envisager systématiquement des peines (…) non privatives de liberté » pour les personnes dont la condition est incompatible avec la détention.
Aménagement pour raison médicale
Et pour ceux déjà incarcérés ? « Dans certaines situations, il apparaît indispensable de se poser la question de la poursuite de l’incarcération, au regard du sens de la peine et de la prévention des traitements inhumains ou dégradants », souligne-t-elle. Des outils juridiques permettent d’interrompre l’incarcération, si nécessaire. Mais ils ne fonctionnent pas pleinement. « Un repérage systématique des personnes susceptibles de bénéficier d’un aménagement ou d’une suspension de peine pour raison médicale doit être mis en place », préconise-t-elle.
Le vieillissement de la population rend urgent l’évolution de la situation. Tout comme l’allongement des durées des peines et des prescriptions. En 2017, 2 823 personnes âgées de plus de 60 ans étaient en prison. Huit fois plus qu’en 1980.