Monsieur le Gouverneur (préfet)
Monsieur le Directeur du Centre annexe de l’Ecole des sous-officiers de la gendarmerie de Fatick.
Messieurs les Officiers et sous-officiers de la gendarmerie, en vos rangs et grades
Chers invités.
La torture, définie comme étant le fait, pour un agent public, d’exercer des violences physiques ou psychologiques sur une personne dans le but d’obtenir d’elle des renseignements ou des aveux, de lui faire subir des représailles, ou des actes d’intimidation ou de discrimination quelconque, est une méthode, hélas, encore utilisée, par les forces de l’ordre.
Or le Sénégal, attaché à une longue tradition d’Etat de droit et ainsi soucieux de la promotion et de la protection de tous les droits humains, a très tôt ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture et son protocole facultatif, tout en votant la loi 2009-13 du 02 mars 2009, instituant l’Observateur National des Lieux de Privation de Liberté ; institution dont la mission est de prévenir la torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants dans les lieux de privation de liberté.
C’est dans le cadre de ce mandat que l’observateur n’a eu de cesse, depuis sa création, d’entreprendre des missions de sensibilisation et de formation à travers tout le pays.
A ce titre, au courant du mois de juin 2019, mon équipe d’observateurs délégués et moi-même avons fait bénéficié à cinq cent (500) élèves agents de police de l’école nationale de police de Thiès, d’une formation en droit humain, notamment dans le cadre de l’exercice de la police administrative et judiciaire.
La session de cette semaine entre dans le même programme de formation des agents d’exécution des lois. Ainsi, L’ONLPL revient à l’école de gendarmerie de Fatick, après une première session tenue en 2018, avec cette fois-ci une cible privilégiée, car nous aurons à faire, non plus à des élèves gendarmes, mais à des élèves sous-officiers de la gendarmerie qui occuperont à leur sortie des postes de commandement et seront appelés à prendre, en toute autorité, des décisions de privation de liberté qui peuvent parfois, dans leur exécution, porter atteinte aux droits humains.
Donc partout, c’est l’occasion pour les observateurs de rappeler aux responsables et aux agents leurs devoirs de veiller au respect des droits des personnes privées de liberté et de les inviter à être professionnels dans les actes qu’ils posent.
En effet, il est depuis longtemps admis que le respect des droits humains par ceux qui détiennent la puissance publique ne va pas de soi. J’en veux pour preuve que récemment l’intervention de la gendarmerie à Koumpentoum pour retrouver les individus suspectés d’avoir lâchement tué le commandement de brigade, tombé dans l’exercice de ses fonctions, s’est faite sous de fortes allégations de torture.
Par le passé, Dominique LOPY est décédé des suites de torture dans les locaux du commissariat de Kolda, le 13 avril 2007 ; Ibrahima SAMB aurait été torturé à mort par quatre policiers à Mbacké en 2013.
Je demeure convaincue que c’est seulement par le biais de la formation, voir de la sensibilisation que nous pourrons acquérir la culture des droits humains et ainsi ériger les remparts contre toute atteinte à la dignité, à l’intégrité physique ou aux autres droits de la personne humaine.
Monsieur le gouverneur, en me faisant l’honneur de présider la cérémonie d’ouverture de cette session de formation, vous témoignez de votre dévouement personnel et, si besoin en était encore, de l’engagement de l’Etat du Sénégal dont vous êtes le plus illustre représentant au niveau régional, a toujours œuvrer pour la promotion et la préservation des droits humains.
Soyez en donc remercié,
Monsieur le Directeur, en autorisant les élèves sous-officiers de la gendarmerie placés sous votre autorité, à bénéficier de cette formation, vous montrez votre désir de maintenir, haut, le flambeau de la gendarmerie sénégalaise qui a toujours brillé magnifiquement aussi bien au niveau national, qu’ au niveau international, lors des missions de maintien de la paix dans les zones instables, où nos agents se sont illustrés par leur professionnalisme, leur courage et leur discipline.
Je vous exprime aussi ma gratitude pour votre engagement sans faille à la bonne tenue de cette session de formation. Ce faisant vous montrez, d’ores et déjà à vos élèves, la voie à suivre dans l’exercice de leurs futures missions.
Je voudrais aussi profiter de cette tribune pour remercier le HCDH-BRAO, en la personne de son représentant, Monsieur Andréa ORI, un partenaire de tous les jours, dont l’appui technique et financier a décisivement contribué à la tenue de cet atelier de formation.
Enfin, aux élèves sous-officiers de la gendarmerie, je formule mes encouragements à toujours préserver dans la culture des droits humains.
Dans l’exercice prochain de vos missions, vous serez détenteurs de la force publique et, à ce titre, vous serez autorisés, dans des conditions clairement définies par la loi, à porter atteinte à la liberté et aux autres droits de vos concitoyens.
Mais en le faisant, ne perdez jamais de vue que vous avez prêté serment de servir avec honneur et que votre vocation est de protéger l’Etat et vos concitoyens dans le respect de leurs droits et liberté.
Gardez toujours à l’esprit que le citoyen en conflit avec la loi, n’en demeure pas moins un sujet de droit. Des droits que vous êtes tenus de protéger en les conciliant avec les devoirs de votre mission de préservation de l’ordre et de la paix publics.
Comme je vous l’ai dit cela ne va pas de soi. Et c’est seulement par la formation que vous acquerrez les outils qui vous permettront de faire la part des choses.
Alors, je souhaite vivement que la formation qui vous sera donnée contribuera à renforcer vos capacités sur les droits humains afin de mieux vous préparer à l’exercice prochain de vos missions.
Je vous remercie de votre aimable attention.