Rapport sous-comité

CAT/OP/SEN/R.2

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Rapport du Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sur sa visite de conseil au mécanisme national de prévention du Sénégal

Rapport à l’attention du Mécanisme national de prévention*

  • Conformément à la décision prise par le Sous-Comité ourp la prévention de la torture à sa cinquième session concernant le traitement de ses rapports de visite, le présent document n’a pas été revu paresl services d’édition avant d’être envoyé aux servicesde traduction de l’Organisation des Nations Unies.

  1. Introduction

 1. Conformément au Protocole facultatif se rapportantà la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (« le Protocole facultatif »), le Sous-Comité pour la prévention de la torture («le SPT ») s’est rendu en République du Sénégal du 10 au 14 décembre 2012.

  1. Le SPT était représenté par les membres suivants: livierO Obrecht (chef de la délégation), Malcolm Evans, Aisha Shujune Muhammadet Aneta Stanchevska.
  1. Le SPT était assisté de deux spécialistes des droits de l’homme et d’un agent de la sécurité du Haut-Commissariat des Nations Unies auxdroits de l’homme (HCDH), ainsi que d’interprètes locaux.
  1. L’objectif principal de la visite était de fournir des conseils et une assistance technique au Mécanisme national de prévention de latorture du Sénégal, conformément aux dispositions de l’article 11 b) du Protocole facultatif.
  1. Dans le présent rapport figure un ensemble de recommandations à l’intention de l’Observateur national des lieux de privation de liberté (« l’Observateur » ou « ONLPL »), qui est le mécanisme national de prévention du Sénégal. Ces recommandations sont faites dans le cadre du mandat fixé par les dispositions du paragraphe b) des alinéas ii) et iii) de l’article 11 du Protocole facultatif, qui prévoient que le SPT offre aux mécanismes nationaux de prévention une formation et une assistance technique en vue de renforcer leurs capacités ainsi que des avis et une assistance pour évaluer les besoins et les moyens nécessaires afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres mauvais traitements.
  1. Le présent rapport est transmis au Mécanisme national de prévention à titre confidentiel, et la décision de le rendre public est laissée à sa discrétion.Toutefois, le SPT en recommande la publication et souhaite être informé de la décision que le mécanisme prendra.
  1. Le SPT adressera aux autorités de l’État partie des recommandations dans un rapport confidentiel distinct.
  1. Le SPT tient à remercier l’Observateur national des lieux de privation de liberté pour sa coopération et lui sait gré d’avoir facilité lavisite.

  1. Déroulement de la visite de conseil

 

  1. La visite consultative a été planifiée conjointemenpar le SPT et le Mécanisme national de prévention. Plusieurs réunions en privéont été tenues avec l’ONLPL au cours desquelles ont été examinées des questions relatives à sa mise en place, son fonctionnement, ses méthodes de travail, son indépendance, les modalités de visites et les recommandations formulées à l’issue de celles-ci. Le SPT et l’ONLPL ont également effectué ensemble des visites dans des lieux de privation de liberté afin que le SPT puisse observer le travail de l’ONLPL.
  1. Outre les réunions et les visites effectuées avec ’ONLPL,l le SPT s’est entretenu avec des représentants du Gouvernement sénégalaist ed’organisations de la société civile, ainsi que le responsable du Bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest du Haut-Commissariat des Droits de l’Homme à Dakar et la Co ordonnatrice Résidente du système des Nations Unies au Sénégal.

  • Recommandations à l’intention du Mécanisme national de prévention

 

  1. Le SPT prend note des activités menées par l’Observateur, Monsieur Diouf Tall, depuis sa nomination le 19 janvier 2012 par le Décret n° 2012-119. Le SPT souligne l’adoption en novembre 2012 du règlement intérieurpar la décision nº 1-2012 et la création du Comité National de Veille de l’ONLPL par la décision nº 2-2012, formalisant des processus organisationnels et structurels. Le Comité note également l’adoption du Guide pratique pour les visites le 26 novembre 2012.
  1. Le SPT salue les efforts menés par l’Observateur national pour établir le contact avec les partenaires potentiels au Sénégal relevantde son mandat de prévention de la torture lors du séminaire organisé les 5 et 6 décembre 2012 à Dakar, Sénégal.
  1. Le SPT prend note des démarches entreprises par l’Observateur pour se mettre en contact avec d’autres mécanismes nationaux de prévention, notamment la visite auprès du mécanisme français de prévention, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté du
  • au 29 juin 2012, et la participation de l’Observateur aux échanges sur la ratification du Protocole facultatif par les pays de la région de ’Afriquel de l’Ouest du 24 au 26 septembre 2012 à Dakar, Sénégal.

  1. Recommandations concernant le cadre normatif du Mécanisme national de prévention

 

  1. Sans remettre en cause l’indépendance de l’actuel Observateur, le SPT a constaté que certains éléments du cadre normatif du Mécanisme national de prévention ne permettent pas de garantir l’indépendance de l’institution conformément aux dispositions de l’article 18 du Protocole facultatif.
  1. Le STP relève notamment : a) le rattachement, en vertu du Décret 2012-1223 du 5 novembre 2012, de l’Observateur au Ministère de la Justice en tant qu’ « autre administration », b) la procédure de désignation del’Observateur sur proposition du Ministère de la Justice, telle que prévue par le Décret nº 2011-842 du 16 juin 2011, portant application de la Loi nº 2009-13 instituant l’Observateur national, c) la pratique de mise à disposition de l’Observateur national d’agents par le Gouvernement, prévue par l’article 3 du même Décret. Le SPT note également l’interprétation restrictive apportée aux pouvoirs de l’Observateur comme excluant les lieux de privation de liberté sous la juridiction des forces armées.
  1. Le SPT a fait part de ces préoccupations dans le rapport de la visite adressé au Gouvernement sénégalais.
  1. Le SPT engage l’Observateur, conformément aux dispositions de l’article 8 de la loi 2009-13 du 2 mars 2009 lui donnant mandat de faire des recommandations d’ordre législatif, de faire un plaidoyer pour le renforcement du cadre juridique de l’institution. Ce faisant, l’Observateur devrait ad resser des recommandations pour que: a) l’Observateur national des lieux de privation de liberté soit séparé du pouvoir exécutif ; b) l’Observateur puisse sélectionner, recruter et rémunérer lui-même son propre personnel ; c) le processus de désignation de l’Observateur soit ouvert, inclusif et participatif ; et d) les pouvoirs et mandat du Mécanisme national de prévention soient dûment mis en conformité avec les dispositions des articles 4 et 20 du Protocole facultatif.

  1. Recommandations d’ordre institutionnel

 

  1. Les préoccupations du SPT concernent principalement l’absence d’une stratégie et d’un plan de travail pour s’acquitter du mandat de l’Observateur, l’instabilité des ressources financières à la disposition de l’Observateur, une structure du personnel inadéquate, le retard dans le démarrage des activités de visite delieux de privation de liberté, et le manque de visibilité.
  1. La mise en œuvre du mandat d’un mécanisme national de prévention demande qu’une attention suffisante soit portée aux différentes attributions telles que définies par l’article 19 du Protocole facultatif : l’examen régulier de la situation des personnes se trouvant dans des lieux de privation de liberté, la formulation de recommandations pour améliorer leur situation et prévenir la torture etles mauvais traitements, et la présentation de recommandations d’ordre législatif et réglementaire.
  1. Le SPT engage l’Observateur à faire un état des lieux des lacunes en matière de prévention de la torture notamment au regard du cadre législatif et du suivi de la situation dans les lieux de privation de liberté, et à formuler une stratégie de réponse à cet état des lieux dans le cadre de son mandat. Cete stratégie devrait identifier les lignes directrices d’action et de collaboration lui permettant d’utiliser ses ressources le plus rationnellement possible et d’éviter un chevauchement avec les activités menées par d’autres acteurs tels la Commission nationale des droits de l’homme et les organisations de la société civile. A cet égard, le SPT rappelle qu’un des principes de base de la mise en place d’un mécanisme national de prévention est que ce dernier devrait compléter plutôt que remplacer les systèmes de surveillance déjà existants.1
  1. En outre, la stratégie devrait arrêter les critères de priorisation des lieux de privation de liberté qui feront l’objet d’inspections périodiques, en fonction du type et de la taille des établissements, de la gravité des problèmes de droits de l’homme dont l’Observateur aura eu connaissance ainsi que de l’accessibilité des établissements par d’autres mécanismes de surveillance.
  1. Sur la base de cette stratégie, l’Observateur devrait établir un programme de travail [et de collaboration] qui couvre progressivement tous les lieux de privation de liberté ainsi que les lieux où pourraient se trouver des personnes privées de liberté, conformément aux dispositions des articles 4 et 29 du Protocole facultatif, tout en s’assurant qu’aucun type d’établissement ou une zone géographique ne soit exclu.
  1. S’agissant de la présentation de recommandations d’ordre législatif et réglementaire, l’Observateur pourrait prioriser les questions législatives et réglementaires identifiées lors des visites effectuées avec le SPT ainsi que les recommandations du Comité contre la torture des Nations Unies (CAT/C/SEN/CO/3).
  1. Le SPT a fait part aux autorités sénégalaises de son inquiétude face à l’absence d’un budget stable et adéquat alloué au Mécanisme national de prévention, entravant son bon fonctionnement. Pour autant, tout en notant le projet de budget de 300 millions de francs CFA proposé par l’Observateur pour l’année 2013, leSPT regrette qu’il ne lui ait pas été possible d’appréhender les coûts liés à la mise en œuvre du mandat de l’Observateur, le projet de budget ne fournissant de détails que sur les indemnités du personnel de l’institution.
  1. Le SPT recommande au Mécanisme national de prévention de développer un budget détaillé des dépenses nécessaires à la miseen œuvre de son programme de travail mentionné. Ce budget devrait distinguer les coûts liés à l’installation de

l’Observateur, les différentes dépenses fixes nécessaires au fonctionnement de l’institution, et celles qui sont variables et dépendent des activités spécifiques à mener, telles que les visites de lieux de privation de liberté. L’Observateur national devrait également utiliser les moyens à sa disposition, notamment le Comité de veille dont un membre est un parlementaire, pour faire valoir, sur la base d’un budget détaillé, l’importance d’une allocation budgétaire plus conséquente que celle de l’année 2012.

  1. Le personnel technique du Mécanisme national de prévention au moment de la visite était composé de deux magistrats détachés par le Ministère de la Justice. Outre l’inquiétude exprimée plus haut quant au risque posé par cette ratiquep sur l’indépendance du Mécanisme national de prévention, le SPT est préoccupé par l’insuffisance en nombre et le manque de diversité dans l’expertise du personnel. Le SPT est conscient que le règlement intérieur de l’Observateur prévoit l’appel à des intervenants externes qui pourront combler ce manque d’expertise et que la difficulté à laquelle se heurte l’Observateur dans la composition de son personnel est liée aux contraintes budgétaires.
  1. Tout en soulignant la nécessité de maintenir une structure organisationnelle la plus légère possible dans un souci de pérennisationde l’institution, le SPT recommande au Mécanisme national de prévention de iversifierd le profil de son personnel technique et d’étudier des mesures créatives visant à renforcer ses ressources humaines, comme des programmes de stage ou des partenariats avec des universités et des organisations de la société civile.
  1. Le SPT se félicite de ce que l’Observateur ait pu effectuer ses premières visites de lieux de privation de liberté lors la visite du SPT au Sénégal et que l’Observateur entend remettre un rapport sur ses observations et les recommandations s’y rapportant.
  1. La délégation recommande à l’Observateur d’entreprendre des visites de suivi des établissements visités conjointement avec le SPT afin d’observer l’application des recommandations formulées. Le SPT engage égalementl’Observateur à continuer à effectuer des visites quelles que soient les ressources mises à sa disposition, en commençant par les établissements dans la région de Dakar dont la visite n’engendrera pas des dépenses conséquentes.
  1. Le SPT prend note des activités de communication menées par l’Observateur depuis son installation et le développement en cours de sastratégie de communication. Toutefois, le SPT a constaté que ses principaux interlocuteurs dont les chefs d’établissements et les personnes privées de liberté n’ont pas encore connaissance de l’existence de l’institution.
  1. Le SPT recommande à l’Observateur de continuer ses activités visant à accroître sa visibilité et faire connaître son mandat et son travail au public. La stratégie de communication de l’Observateur devrait prévoir l’établissement de procédures simples et accessibles permettant au public de lui communiquer des renseignements pertinents. Le SPT recommande aussi d’inclure dans sa stratégie la participation aux activités du Gouvernement sénégalais pertinentes à son mandat, le renforcement des contacts avec les partenaires nationaux, et la participation aux programmes de formation des magistrats, des officiers de police, des gendarmes, des agents pénitentiaires, des agents de la santé et des membres des forces armées.
  1. L’Observateur devrait prendre des mesures pour que ses rapports annuels puissent être présentés et débattus au Parlement, pluse de leur présentation au Président de la République.

  1. Recommandations d’ordre méthodologique

 

  1. Le SPT souligne d’emblée que la brièveté des visiteeffectuées conjointement avec le Mécanisme national de prévention n’a pas permis d’appliquer les différentes méthodologies relatives à une visite de lieux de privation de liberté. Par conséquent, les commentaires du SPT concernent tant les méthodologies observées que celles que l’Observateur devrait prendre en considération, qu’elles soient prévues ou non dans le Guide pratique sur les visites des lieux de privation de liberté adopté par l’Observateur (« Guide pratique »). Le SPT recommande que, le cas échéant, les recommandations soient prises en compte dans la révision des documents institutionnels pertinents, tels que le Règlement intérieur ou le Guide pratique.

Préparation préalable

  1. Le SPT constate que le Guide pratique sur les visites des lieux de privation de liberté élaboré par l’Observateur porte spécifiquement surles méthodologies applicables aux visites d’établissements pénitentiaires.
  1. L’Observateur devrait élaborer des méthodologies pour les visites d’autres types de lieux de privation de liberté qui rentrent dans le mandat du Mécanisme national de prévention, tels que les postes de gendarmerie, les commissariats ou encore les établissements de santé. S’agissant desvisites de postes de gendarmerie et des commissariats de police, les points à contrôler sont principalement la procédure réglementaire concernant les interrogatoires et la tenue des registres ainsi que le déroulement de l’arrestation et l’arrivée au lieu de détention.
  1. L’Observateur a informé le SPT que les différents Ministères lui ont remis la liste des lieux de privation de liberté sous leur responsabilité, sauf ceux administrés par le Ministère des Forces Armées.
  1. Le SPT recommande à l’Observateur national de const ituer une base de données des lieux de privation de liberté au Sénégal où seront consignées les informations à sa disposition. La base de données devrait inclure les informations énumérées au point 2.1 du Guide pratique mais égalem nt les caractéristiques physiques de chaque établissement tels que le plan des quartiers et l’agencement des lieux ainsi que les dimensions des locaux, cours et cellules. La base de données devrait être alimentée par les informations recueillies aufur et à mesure des visites.
  1. Le SPT estime que les visites inopinées ou annoncées peu de temps à l’avance permettent de se faire une idée plus proche de la réalité des conditions de vie qui règnent dans un lieu de privation de liberté.
  1. Le SPT recommande à l’Observateur d’inclure dans le Guide pratique la possibilité d’effectuer des visites inopinées et demaintenir confidentiel le programme de ses visites.

Déroulement des visites

  1. En raison du temps disponible, la visite de la prison de Reubeuss n’a permis de faire qu’un tour général des locaux en plus de l’entretie avec l’administration de l’établissement au début et à la fin de la visite. En d’autres termes, la visite n’est pas allée au-delà de ce qui pouvait être observé et n’a pas permis entre autresde s’entretenir en privé avec les détenus et avec le personnel carcéral, ou encore de consulter les registres de manière adéquate.
  1. Le SPT souligne qu’une visite complète d’une prison comme celle de Reubeuss nécessite plusieurs jours. L’équipe visiteuse devrait diriger la visite en suivant un programme défini au préalable en fonction de l’objectif de la visite. Le SPT recommande également à l’Observateur de recourir à des pratiques de collecte d’information autres que les entretiens, notamment l’observation passive ou encore la répartition de l’équipe de visite en groupes stationnés à différents endroits de l’établissement.
  1. Le SPT confirme l’importance des différents éléments identifiés par l’Observateur au point 3.1 du Guide pratique qui devraient être soulevés lors de l’entretien avec le responsable du lieu de détention au début de la visite.
  1. Le SPT souligne toutefois l’intérêt de maintenir cet entretien aussi court que possible afin de pouvoir consacrer plus d’attention aux conditions de détention. D’ailleurs, un tel entretien avec le responsable de l’établissement pourrait ne plus être nécessaire lors des visites de suivi. Les lieux sensibles qui feront l’objet d’une visite plus approfondie peuvent être identifiés lors du général d’un établissement. Enfin, le SPT estime que des entretiens en privé avec des membres du personnel de l’établissement ne devraient pas se faire uniquement à leur demande (Guide pratique, point 3.3.4).
  1. Outre les éléments énumérés au point 3.2.2 du Guide pratique, l’Observateur devrait porter son regard sur d’autres facteurs moins tangibles qui affectent les conditions de détention tels que les relations entre le personnel carcéral et les détenus, l’existence de hiérarchies formelles ou informelles entre les détenus, les conditions d’accès à des endroits favorisés où les détenus bénéficient de meilleures conditions. Ce type d’information peut être recueilli à travers des entretiens en dehors du tour général des locaux et sans la présence du personnel de l’établissement.
  1. Le Guide pratique prévoit la présentation de l’équipe visiteuse lors de l’entretien avec le responsable du lieu de détention, sans qu’une présentation similaire soit prévue lors des entretiens avec les personnes privées de liberté.
  2. Le SPT recommande que l’équipe visiteuse se présent aux détenus lors des entretiens avec ceux-ci et leur explique le mandat du Mécanisme national de prévention, en insistant sur son objectif de prévention, ainsi que l’objectif même de l’entretien. Il est indispensable d’obtenir le consentement du détenu en précisant que l’entretien est confidentiel et volontaire et qu’il peut être interrompu à tout moment à sa demande.
  1. Le SPT recommande au Mécanisme national de prévention de produire des brochures à l’intention des personnes privées de liberté et de leurs proches, présentant son mandat, ses méthodes de travail, et les moyens de le contacter. La brochure devrait également expliquer ce qu’est le consentement éclairé et préciser que toute forme de représailles devrait être portée à son attention.
  1. La possibilité de s’entretenir individuellement avec un détenu est prévue dans la méthodologie du Mécanisme national de prévention seulement lorsque la situation de celui-ci apparaît anormale en comparaison aux autres détenus.
  1. Dans la mesure où les visites du Mécanisme national de prévention ont pour objectif d’émettre des recommandations abordant des problèmes systématiques et non d’identifier des cas problématiques individuels, le SPT est d’avis que l’entretien individuel ne devrait pas être utilisé exclusivement en cas de situation anormale, mais aussi pour recueillir des informations sur les conditions générales de détention. Tout en respectant les règles de sécurité en vigueur dans l’établissement, le SPT attire l’attention de l’Observateur sur la possibilité de mener des entretiens avec les détenus à l’intérieur des cellules et sans surveillance.
  1. Le SPT note avec intérêt que le Mécanisme national de prévention reconnaît que l’entretien en groupe ne permet pas d’aborder les sujets les plus sensibles. Le SPT attire également l’attention aux risques auxquels un entretien en groupe pourrait exposer certains détenus, tels que les représailles, et au fait quela situation peut devenir rapidement hors contrôle.
  1. Le SPT recommande à l’Observateur de réfléchir aux situations qui conviendraient aux entretiens en groupe et d’élaborer dans le Guide pratique les sujets qui peuvent être soulevés lors de ce genre ‘entretiensd. (Guide pratique, point
  1. Tout en notant les mesures de protection contre les représailles prévues par la législation, notamment la protection de l’identité des personnes qui ont été en contact ou ont collaboré avec l’Observateur national ainsi que la protection des agents de l’État contre des mesures disciplinaires, le SPT relève l’absence de mesures spécifiques dans la méthodologie développée par l’Observateur .
  1. Le SPT recommande à l’Observateur de développer une méthodologie pour la protection des personnes ayant été en contact ou ayant collaboré avec lui contre les représailles en tenant en compte du contexte sénégalais. Le SPT se réfère entre autres à la possibilité de faire appel aux organisations partenaires pour faire un suivi, au maintien de contacts avec les membres des familles des personnes détenues, ou encore à un rappel aux personnels des lieux de privation d e liberté visités que toute forme d’intimidations ou de représailles contre les personnes ayant collaboré avec l’Observateur, et de manière générale, toutes les personnes privées de liberté, constitue une violation de la loi.
  1. Se référant au point 3.3.5 du Guide pratique de l’Observateur national, le SPT est d’avis que l’entretien final avec le responsable de l’établissement visité devrait être consacré à la présentation des principales observations et, le cas échéant, des recommandations, notamment celles qui peuvent être mises en place immédiatement. Le SPT estime qu’il est indispensable d’être transparent avec le responsable de l’établissement au moment de l’entretien final sur les principaux problèmes identifiés sauf dans le cas particuliers où il est estimé que l’intégrité physique et morale des personnes détenues serait compromise du fait même de l’implication directe du responsable de l’établissement (situation requérant une intervention auprès des autorités supervisant ce responsable).

Après les visites

  1. Le SPT recommande au Mécanisme national de prévention d’établir les rapports de visite le plus rapidement possible afin que les responsables des établissements visités puissent faire le lien entre la visite et le rapport. S’agissant du contenu, en plus des informations générales sur la visite et les problèmes observés,le rapport devrait inclure des informations qui permettent aux lecteurs, y compris ceux qui ne connaissent pas les établissements visités,de se représenter concrètement les situations. Ainsi, les rapports devraient décrire esl endroits visités en précisant, par exemple, les dimensions des cellules, l’éclairage, la présence de sanitaires ou encore la ventilation. 
  1. Dans ses rapports, le Mécanisme national de prévention devrait formuler des recommandations pratiques et des propositions de mesures correctives qui peuvent être suivies et vérifiées. Les recommandations devraient mettre l’accent sur la prévention et lister les causes profondes des problèmes constatés dans les lieux de détention. Par exemple, dans le cas du surpeuplement dans la prison de Reubeuss, le Mécanisme national de prévention devrait adresser des recommandations quant au désengorgement du système judiciaire au Sénégal. De même, l’enregistrement en bonne et due forme de la privation de liberté étant une des garanties fondamentales contre le mauvais traitement, le Mécanisme national de prévention devrait adresser des recommandations quant à la mise au point d’un système de registre harmonisé et uniformisé et, si possible, informatisé, de manière à permettre le contrôle effectif de la détention de toute personne .
  1. recommandations du Mécanisme national de prévention devraient se baser sur les normes internationales des droits de l’homme, et en particulier les normes pertinentes des Nations Unies en matière de prévention de la torture et autres mauvais traitements, comme le prévoit le Protocole facultatif.

  1. Recommandations finales

  1. Le SPT estime que le mandat robuste de l’Observateur national des lieux de privation de liberté lui confère un potentiel important en tant que mécanisme national de prévention. Dès lors, le SPT encourage l’Observateur à examiner ses méthodes de travail de manière régulière et à suivre des formations afin de renforcer sa capacité à s’acquitter de ses responsabilités conformément au Protocole facultatif.
  1. Le SPT encourage l’Observateur à solliciter l’assis tance du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme dans le suivi des présentes recommandations. En l’occurrence, le SPT encourage l’Observateur à envisager la tenue d’un atelier au niveau national pour adopter un programme de mise en œuvre des recommandations formulées par le SPT à l’issue de cette visite de conseil.
  2. Le SPT encourage l’Observateur à lui transmettre se s rapports annuels et confirme sa disponibilité à apporter son assistance dans la mesure de ses possibilités en vue de la réalisation de l’objectif commun, la prévention dela torture et des mauvais traitements et afin que les engagements pris se traduisent en actions concrètes.

Annexe I

Liste des lieux de privation de liberté visités conjointement par le SPT et l’ONLPL

  • Maison d’Arrêt et de Correction de Reubeuss, Dakar
  • Commissariat Central de Police de Dakar
  • Commissariat de Reubeuss (2ème arrondissement), Dakar

Annexe II

Liste des hauts fonctionnaires et des autres personnes rencontrées par le SPT

Ministère des Affaires Etrangères et des Sénégalaisde l’extérieur

  • Al Khalil I. Seek, Directeur des Affaires Juridiques
  • NDongo Dieng, Conseiller des Affaires Etrangères
  • Mme Faye Ramatoulaye Ba, Chef Division du Contentieux

Ministère de la Justice

  • Mouhammadou Moustafa Seye, Directeur des Droits Humains
  • Ousmane Faye, Direction de l’Administration Pénitentiaire

Ministère de la Santé et de L’Action Sociale

  • Seydou Boubaka Badiane, Professeur de Médecine,Conseiller Technique
  • Bineta Sène, Point Focal, Prévention Violence et Traumatismes

Ministère de l’intérieur

  • Mme Ibrahima Faye, Commandant de Police, Direction de la Police Judiciaire

Bureau de l’Avocat Général

  • Mme Bousso Diaw Fall, Cour d’Appel de Dakar

Mécanisme national de prévention

  • Boubou Diouf Tall, Observateur National des Lieux de Privation de Liberté
  • M Thieyacine Fall , Secretaire Général
  • M Raymond Henri Maurice Mariam Diouf, Adjoint de l’Observateur

Institution Nationale des Droits de l’Homme

  • Sidy Diop, membre du Comité Sénégalais des Droits de l’Homme
  • Adoulaye Mar, Secrétaire Permanent

Système des Nations Unies

  • Mme Bintou Djibo, Coordonnatrice Résidente du système des Nations Unis au Sénégal et représentante résidente du Programme desNations Unies pour le développement (PNUD) au Sénégal
  • Benjamin Houton, Bureau Régional pour l’Afrique de l’Ouest du Haut-Commissariat des Droits de l’Homme

Société civile

  • Action des Chrétiens Contre la Torture (ACAT)
  • Organisation Nationale des Droits de l’Homme (ONDH)
  • Amnesty International Sénégal (AIS)
  • Rencontre Africaine de Défense des Droits de l’Homme (RADDHO)
  • Ligue Sénégalaise des Droits de l’Homme (LSDH)